samedi 15 août 2015

Eric Dubruel mes bien chers frères, mes bien chères soeurs ....


Ah, oui, le titre …. Mes biens chers frères, mes bien chères sœurs …

oui, j'aime bien Monsieur Eddy.

J'aime ses musiques,

J'aimais « la dernière séance»

depuis plus de 40 ans, il apporte la preuve que les stars peuvent préserver leur vie privée des journalistes people et des paparazzi.

Quand il dit qu'il arrête ses tournées, il arrête vraiment … contrairement à d'autres qui ne cessent de revenir sur scène pour la dernière fois depuis 20 ans, chaque année avec moins de voix et plus de suffisance.

Il arrête, oui, sauf pour se produire avec ses vrais amis: peut-être avez eu, comme moi, la chance de voir le spectacle «les vieilles canailles» l'an dernier à Bercy …Eddy, Johny et Jacques sur scène …. un vrai régal et une certitude confirmée: le skye conserve !




Bon, je brise là ces propos très personnels et sans grand intérêt, pour vous laisser découvrir les aventures un peu hors du commun de quelques bien chers frères et bien chères sœurs de certains de nos ancêtres directs …....



…. en fait, il n'y a que des bien chers frères !



Baptiste :  «  c'est grave Docteur … ?»

Jean-Pierre Balencie, arrière-grand-père de Mita, était avocat à Lourdes et représentait le canton d'Aucun au conseil général des Hautes-pyrénées. Il siégea dans cette noble assemblée de 1848 à 1858, date de son décès, sur les bancs de la majorité dynastique.

L'un de ses frères, Baptiste, médecin, lui succéda, mais comme élu Libéral de 1858 à 1870. Il fut, par ailleurs conseiller municipal de Lourdes de 1855 à 1900.

De février à mars 1858, une dénommée Bernadette Soubirous, jeune paysanne analphabète, raconte ses rencontres, à proximité de la grotte de Massabielle, une dame blanche. Ala 18ème de ces rencontres, celle-ci se présente comme «l' immaculada conceptiou» et demande, avec insistance que l'on fasse construire une chapelle sur le lieu de leur rencontre.

Comme on prête un ou deux miracles à la jeune paysanne, il n'en faut pas davantage pour mettre la ville en émoi.

Le préfet, Oscar Massy craignant que ce «fatras de superstitions» ne déconsidère la «vraie» religion va chercher à calmer les esprits et à faire rentrer les choses dans l'ordre.

Il décide de nommer 3 médecins pour procéder à l'examen de Bernadette leur recommandant chaudement d'établir certificat médical préconisant son internement.

Son choix se porte sur Baptiste, médecin de l'hospice de la ville et deux de ses confrères, les docteurs Lacrampe et Peyrus.

L'examen se déroule le 27 mars 1858. Force est de constater qu'aucun médecin ne trouve le plus petit signe psychiatrique qui nécessiterait un internement.

Voici donc des praticiens honnêtes mais contrariés ….Monsieur le préfet ne va pas être content !

Ces honorables compères vont tenir conciliabule et il ne leur fallut pas moins de 4 jours pour rédiger un diagnostic embarrassé, évoquant une maladie qui ne peut faire courir aucun risque à la santé de Bernadette et certifiant que «lorsque celle-ci ne sera plus harcelée par la foule, elle cessera de penser à la grotte et aux choses merveilleuses qu'elle raconte …»

du grand art et du politiquement correct.

Rassurée par ce diagnostic, Bernadette rentra chez elle et l'on n'entendit plus jamais parler de cette stupide histoire de grotte à dormir debout.

 
 

Raymond : «  ce n'est pas bien de pousser comme ça... »

Ancêtre de Mita à la 13ème génération, Corbeyran de Cardaillac de Lomné, capitaine gascon se mit au service de Marie Stuart de 1548 à 1561, date à laquelle il quitta la ville de Durban dont il était gouverneur pour regagner la France et combattre les huguenots comme mestre de camp des armées catholiques. S'étant emparé de la ville du Havre, il en fut nommé gouverneur et n'eut de cesse de l'embellir et de la fortifier 20 ans durant.

Son frère, Raymond de Cardaillac, dit de Sarlabous, fut un des plus grands capitaines de son temps qui ne compta pas moins de 30 campagnes au cours desquelles il fut blessé 2 fois très grièvement.

Compagnon d'armes et ami intime de Blaise de Montluc, Raymond, catholique farouche, était bien vu du roi Charles IX qui lui ouvrait, volontiers , les portes du Louvre.

Il y séjournait, à la St Barthélémy de 1572, lorsque les ducs de Guise, d'Aumale et d'Angoulême, le prièrent de les suivre, avec d'autres gentilshommes, hommes d'armes et quelques spadassins, pour une mission aussi secrète que de confiance.

La troupe se rendit rue de Béthisy, aujourd'hui rue de Rivoli, au domicile de l'amiral de Coligny, chef des protestants, qui venait d'être blessé par un tir d'arquebuse qui aurait du être mortel.

S'étant fait ouvrir la porte qui donne sur la rue, la troupe traverse la cour, pénètre dans l'hôtel particulier de Coligny et parvient au chevet de l'amiral qu'un dénommé Besme, un sbire de la plus sombre espèce, va transpercer de son épée.

3 hommes vont ouvrir une fenêtre et pousser le cadavre dans le vide aux pieds du duc de Guise, resté dans la cour, afin qu'il puisse constater, de visu, la mort du chef huguenot,

Ils se nommaient : Besme, Petruzzi et … Raymond de Sarlabous.

Chose faite, Raymond écrivit à son frère que «la mort de l'amiral nous délivre et nous glorifie tous et fera le calme du royaume»

En fait de calme, l'assassinat de Coligny et de près de 3000 protestants parisiens, déclenchera la 4èmè guerre de religion... une occasion pour Raymond de remonter en selle, reprendre consciencieusement le commandement de ses troupes et s'en aller vers d'autres campagnes où il continuera de se couvrir de gloire en pourfendant le huguenot.

Nommé Sénéchal de Bigorre en 1585, il mourut gouverneur de Chartres en 1592.



Alexandre : «droit dans ses bottes»

Ancêtre de Mita à la 7ème génération, Pierre Daniel de Boyrie, baron de son état, capitaine dans les Bandes Béarnaises ( milice de la province), puis Lieutenant des Maréchaux et enfin conseiller au parlement de Navarre, mena une existence paisible qui ne fut troublée que par ses nombreux duels et l'arrivée des idées nouvelles dont sa mort, en 1784, lui épargnera de voir l'établissement.

Son frère, Alexandre ( 1726-1816), capitaine au régiment de Navarre, rejoint Orléans Infanterie qu'il ne quittera qu'en 1779 avec le grade de Lieutenant Colonel, la croix de St Louis reçue en 1763 et une pension pour retraite de 1500 livres qui venait s'ajouter à celle de 400 livres reçues en 1766 pour services rendus.

Il est vrai que ces deux régiments furent engagés pendant toute la guerre de sept ans sur les champs de bataille de Rhénanie-Westphalie et Basse-Saxe en s'illustrant à Cassel, Krefeld, Munster, Minden et Closterkamp autant de batailles aussi sanglantes que meurtrières.

La paix signé, en 1763, il passe de garnison en garnison sur les frontières du Nord stationnant successivement à Sedan, Givet, Valenciennes, Dunkerque et Avesnes. En 1768, le ministre de la guerre envoie le régiment caserner au soleil à Tours, La Rochelle, Alès, Béziers, Bordeaux et Blaye. En 1775, il lui fait retraverser la France en direction des places fortes d'Artois d'Arras et de Béthune...

Pour s'occuper, Alexandre, initié dans une loge parisienne et Maître Parfait, participe aux travaux de la loge maçonnique du régiment d'Orléans dont le Vénérable n'est autre que le comte de Brabançon, colonel du régiment.

En 1779, nous l'avons dit, Alexandre troque ses bottes et son tricorne pour les espadrilles et le béret. Il se fixe à Pau et reçoit de son frère Daniel la terre de Nousty qui lui procure quelques revenus et lui permet de siéger, avec la noblesse, aux Etats de Béarn.

Impénétrable aux idées nouvelles, il émigre en Espagne, aux premiers temps de la Révolution, avec son neveu Alexandre, lui aussi officier, mais il se ravise rapidement et rentre chez lui. Quand on a combattu le Prussien et le Hanovrien, sept années durant, on ne craint pas quelques exaltés mal dégrossis.

Installé dans son hôtel particulier de Pau, il se garde bien de faire disparaître ou même de dissimuler la devise de la famille gravée au linteau de sa porte : Deum timete, regem honorificate »

Avec sa perruque poudrée, Alexandre, qui ne fait aucun effort pour passer inaperçu, finit par se faire cueillir, en 1793, par la troupe révolutionnaire qui le jette en prison, inscrivant au registre : «68 ans, arrêté à Pau le 5 septembre, ex chevalier de St louis, aristocrate fieffé, oncle d'émigré, orgueilleux comme un paon, applaudissant aux succès des ennemis de la République, très content de ses revers. Dissimulé avec les gens qui n'étaient pas de sa clique»

La mort de Robespierre et la fin de la Terreur éviteront qu'un couperet aussi républicain que patriote ne tranche la tête de ce dangereux «ennemi de la Révolution». Heureux de voir les Bourbons de nouveau assis sur le trône de France, il s'éteint paisiblement en 1816, à l'âge plus que très raisonnable de 90 ans.




Abraham : « huguenot Béarnais, exilé et baroudeur ... »

Pierre d'Andichon, ancêtre de Mita à la 8ème génération, sentant le vent tourner, abjure son protestantisme pour éviter des ennuis inutiles et avoir tout loisir de se consacrer, paisiblement, à l'administration de son fief de Lafitte pour lequel il fut reçu aux Etats de Béarn en 1689. Il est vrai que la seigneurie valait bien un messe avec « une basse-cour avec un pigeonnier, des vignes, des granges, un bois contigu à des vignes et champs appelé Serrabouecq, la terre de Perraix, la terre de Bru, un chemin public, la terre appelée de Joaime, des vignes et un verger appelés Darriuterre, la vigne de Martalun, la vigne de Suberco, les touyas de Candau, le pré de Saubolle, les terres de Bénéjac, de Barber, de la Commette et de Guilhar, le pré de Lafitte, des touyas et un pré appelés Debaix, un moulin à eau avec des terres. »

Certains, les plus vieux d'entre nous, se souviennent, certainement de ce château, perché sur les hauteurs de Monein, où oncle Charles et tante Louisette Dabbadie savaient si gentiment recevoir.

Le frère cadet de Pierre, Abraham qui sert comme lieutenant d'infanterie, n'entend pas se convertir au catholicisme et saisit une opportunité offerte par Louis XIV. Le roi, qui tient ses officiers en grande considération, vient de signer avec le Danemark un accord qui ouvre les portes de l'armée danoise aux officiers protestants français. Nous sommes en 1683 et la révocation de l'Edit de Nantes ne sera promulguée que 2 ans plus tard.... disons que Louis XIV avait déjà comme une petite idée...

Abraham, devient donc Danois. Il est nommé lieutenant dans le régiment des Gardes du Roi. Le souverain du Danemark décide d'envoyer un contingent appuyer Guillaume d'Orange, fraîchement proclamé roi d'Angleterre, dans sa lutte contre son beau-père, le toujours roi catholique Jacques II. Les armées s'affrontent en Irlande où les danois débarquent en 1689. Abraham est rapidement nommé capitaine au régiment de la Reine. En 1691 Jacques II, vaincu, prend la route de l'exil vers la France. La même année, Guillaume se porte en Flandres, au plus fort de la bataille, emmenant dans ses bagages le régiment de la Reine pour épauler ses alliés de la Ligue d'Augsbourg dans leur guerre contre les Français.

La guerre s'achève en 1696, Abraham est nommé Major.

Le repos à Copenhague est de courte durée, le régiment va, en effet, reprendre la route de l'Italie pour prêter main forte aux Autrichiens dans la conquête des possessions espagnoles de cette péninsule. Sur place, Abraham quitte le régiment de la Reine pour intégrer celui de la Marine. Bingo! C'est ce dernier qui, en 1703, doit quitter l'Italie pour aider l'Autriche à mater l'insurrection hongroise de Rakoczy.

Ce n'est qu'après la victoire autrichienne de Trecsen, en 1708, qu'Abraham, devenu lieutenant colonel de son régiment peut reprendre le chemin du retour et gagner Copenhague en juillet 1709.

Sans avoir vraiment le temps de souffler, «La Marine» se trouve engagé dans une guerre contre la Suède qui se termine par la défaite des Danois, à Helsingborg où le régiment perd 55 hommes.

En 1710, Abraham, nommé colonel de son régiment, va devoir conduire celui-ci dans une nouvelle guerre contre la Suéde en 1712 et 1713, avant que ne vienne, enfin, le temps du repos bien mérité et celui de caserner, loin du tumulte des batailles, dans de paisibles villes du Holstein.

Abraham s'éteindra le 3 mars 1719, après une vie bien remplie, à 59 ans.




Pierre : «exilé Béarnais in the bosom of Abraham»

Suzanne d'Andichon, ancêtre de Mita à la 7ème génération, épousa Jean de Casenave, avocat au parlement de Pau. Leur fils héritera de la seigneurie de Lafitte, à lui léguée par son oncle Jean d'Andichon, curé d'Abos et héritier universel de son père. C'est ainsi que les Casenave devinrent les Casenave de Lafitte … magique non ?

Pierre, frère cadet du curé et de Jeanne, n'a d'autre choix que la carrière des armes. Ce jeune lieutenant reçoit un coup de fil étrange. Nous sommes en 1712 et il a 22 ans : «allo Pierre ? ...c'est tonton Abraham, j'ai une proposition à te faire. Comme tu le sais, je n'ai pas d'enfant et je serais fort marri de voir ma fortune tomber aux mains du fisc danois. Je pense faire de toi mon héritier universel et m'occuper de ta carrière militaire si tu viens t'installer au Danemark … ah ! … une bricole : la religion d' Etat est le protestantisme … tu vois ce que je veux dire ? »

Comme bien d'autres monnaies, la couronne danoise n'a pas d'odeur et le capitaine d'Andichon rejoint le Danemark en septembre 1716 où il se convertit au protestantisme.

Avec l'appui de son oncle, il est nommé capitaine au régiment d'Oldenburg, prestigieux régiment stationné dans le comté homonyme.

Oldenburg, gouverné en union personnelle par les rois de Danemark dont il est le berceau, est un vaste territoire enclavé dans le Hanovre, loin des frontières danoises et donc sensible.

Sur place, il achète, grâce à l'argent d'Abraham, le domaine de Granenfeld.

Un vrai tonton gâteau.

1719, il est muté au régiment de la Marine, dont son oncle Abraham, malade, vient de quitter le commandement.

Il en est nommé major en 1730, puis lieutenant-colonel en 1738, rang qu'il conservera lorsque «la Marine» deviendra, en 1741, le régiment de Bornholm.

En 1731, il épouse Wilhelmine, comtesse Praetorius, dont il aura 3 enfants, tous décédés avant lui. Son épouse décédée en 1736, il reçoit l'autorisation de demeurer sur ses terres d'Haraldskaer, où il établira, 5 ans plus tard une fabrique de pistolets, de fusils et de poudre à canon. L'affaire devenant moins rentable, il se reconvertit dans la fabrication d'ustensiles de cuisine en cuivre. Une affaire qui continuera sa production jusqu'en 1867.

Pierre met à profit cette semi-disponibilité pour retourner voir les siens en Béarn, ce que son oncle Abraham ne put jamais faire. C'est ainsi qu'il assiste, à Monein, en 1744, au mariage de sa nièce Clotilde de Casenave avec le sieur de Laborde.

Il décède en 1751, à 61 ans, n'ayant jamais mis le pied sur le moindre champ de bataille, Frédéric IV, Christian VI et Frédéric V, rois de Danemark pendant cette période ayant tous pris la sage décision de rester en paix avec l'Europe entière.



 

Jean-Baptiste : « engagez-vous, rengagez-vous, vous verrez du pays ! »

Ancêtre de Mita à la 5ème génération, Jean Papy, quitta son village natale des Cabanes, dans la vallée de la Haute-Ariège pour s'établir à Bordeaux, où il ouvrit une maison de négoce. Le 26/9/1814, il épousa sa maîtresse de longue date, profitant de l'occasion pour reconnaître 2 enfants naturels et celui ou celle à naître.

Son aîné de 7 ans, Jean-Baptiste, descendit, lui aussi de sa montagne, mais à cheval pour s'enrôler, le 18/9/1793, dans le très patriote 24ème chasseurs à cheval, uniquement formé de volontaires.

De 1793 à 1795, il combat en Espagne et est blessé d'un coup de feu au genou droit à la bataille de St Laurent de la Muga qui fit plusieurs milliers de morts. Larrey y pratiqua plus de 700 amputations.

Le 24ème : « joli régiment, à parements et collet jaune, peu nombreux, mal équipé, tous en dolman, formé de jeunes gens du midi » dira Desaix »,  rejoint l'armée d'Italie en 1796. Jean-Baptiste y combattra jusqu'en 1801.

en 1802, son bataillon embarque pour Saint Domingue, avec une armée expéditionnaire chargée de remettre de l'ordre dans l'île et de mater la révolte de Toussaint Louverture. Nos 30000 soldats vaincus par l'armée des « gens de couleur » et décimés par la fièvre jaune, n'ont d'autre issue que de capituler. Seuls 8000 d'entre eux parviendront à regagner la France.

L'armée expéditionnaire peut, cependant, s'enorgueillir d'avoir rétabli l'esclavage en Guadeloupe et de l'avoir maintenu dans la Martinique, restituée à la France en 1802 et ce pour la plus grande joie du lobby des planteurs .

Jean-Baptiste rejoint le 24ème en Italie qu'il quittera en 1807 pour gagner la Prusse. Il sera fait chevalier de la Légion d'Honneur après la bataille de Friedland. Un court repos, puis le régiment prend la route de l'Autriche. En 1809, il combat à Essling et à Wagram.

En 1810 et 1811, le 24ème affronte la perfide Albion en Espagne lorsque Napoléon décide de l'intégrer à sa Grande Armée qui doit conquérir la Russie. Les chasseurs vont aller jusqu'à Moscou et, lors de la célèbre et dramatique retraite, Jean-Baptiste est blessé, à la Bérésina, d'un coup de feu au bras droit.

En 1813, le repli de l'armée se poursuit à travers l'Allemagne, le 24ème participe aux batailles de Leipzig et de Hanau, 2 défaites sanglantes. Inexorablement les troupes de Napoléon reculent jusqu'à être pourchassées sur le territoire français et si le 24ème apporte sa contribution aux victoires de Champaubert et de Vauchamp, la fin de l'épopée est signée par l'abdication de l'Empereur le 6 mars 1814.

Louis XVIII, jugeant le 24ème chasseurs trop patriote, prononce sa dissolution et la mise en disponibilité de ses officiers.

Le chef d'escadron, Jean-Baptiste Papy, regagne ses foyers, épouse une jeune fille du pays d'Ariège et décède en 1826., à 52 ans



 
 
Paul :  «missionnaire en Chine»

Anne-Marie Souviron, épousa Laurent Fourcade qui originaire de Saman, avait fondé à Oloron, une maison de commerce de laines, cuirs et peaux. Ils sont les arrières-grands-parents de Mita.

Anne-Marie était née 3ème d'une fratrie de 12, au sein d'une très honorable famille d'Oloron qui exerçait le métier de manufacturier et marchand de draps et de bas depuis 1620.

Son frère Paul, 8ème enfant, naît en 1768. A 14 ans, il voit son frère Alexis revenir d'Espagne, abandonner les affaires et entrer chez les Capucins. Paul décide de rentrer, lui aussi, dans les ordres.

En 1784 il étudie au collège de Lescar, avant de rejoindre, l'année suivante, le séminaire de Calvet, à Toulouse. Cet établissement étant administré par les Sulpiciens, c'est donc, tout naturellement, que Paul intègre, en 1788, le séminaire de St Sulpice à Paris

Sa vocation se précisant, il entre au séminaire des Missions Etrangères en 1792. Réfractaire à la constitution civile du clergé, il émigre en Angleterre en septembre de la même année.

Alexis émigré en Espagne et Paul en Angleterre, il n'en faut pas davantage aux révolutionnaires Oloronais pour considérer leurs parents comme de dangereux factieux, ennemis du peuple et les écrouer au couvent des Cordeliers de la ville transformé en prison.

L'intervention de Pémartin, député des Basses-Pyrénées à la Convention, Défenseur des Droits Authentiques et l'exécution des robespierristes vont décider de leur élargissement.

A Londres, Paul reçoit l'ordination en 1793.

En 1796, il part pour Macao, alors portugaise pour se préparer à sa vie de missionnaire.

En mars 1797, il est nommé pour évangiliser la province chinoise du Set-Chouan. Dénoncé, il est arrêté à peine la frontière passée et déféré, avec les catholiques qui l'accompagnent, devant le tribunal des Mandarins. Tandis que ses compagnons de route sont torturés et , pour certains, mis à mort, Paul est incarcéré à Canton pour y être jugé.

S'étant servi du mouchoir qu'il avait prêté à un compagnon de cellule atteint de fièvre maligne, il contracte la maladie, meurt en mai 1797 et son cadavre est enterré à la va vite dans une fosse peu profonde.

Lors de son exhumation, en juillet, tous sont étonnés de constater que son corps est resté flexible et ne dégage aucune odeur.

Enterré au cimetière des missionnaires de Canton, son corps sera transféré, en 1877, dans la chapelle du sanatorium « Béthanie », propriété des missions évangélistes à Hong-Kong où il repose toujours.

Si Paul n'a pas été reconnu martyr de la foi, il est considéré comme martyr de la Charité.

 
 

Jean : «bonapartiste ou royaliste? Les deux mon général !»

Thérèse Dembarrère épousa Philippe Ravielle, avocat et, en son temps, membre actif des Amis de la Révolution. Ils sont les ancêtres de Mita à la 7ème génération.

Elle était fille de Jean-François Dembarrère, un avocat qui devint juge criminel au sénéchal de Bigorre.

Jean, petit frère de Thérèse, fit une brillante carrière militaire et politique, même si César de Proisy d'Eppe, lui consacre quelques lignes acerbes dans son « dictionnaire des girouettes »

De petite noblesse de robe, mais noble, Jean est admis, en 1768, à l'Ecole royale du Génie de Mézières. Ingénieur en 1770, capitaine en 1777, il est commandant du Génie à Brest en 1792. La même année, il rejoint l'Armée du Nord de Lauriston qui lui confie la défense de la place de Valenciennes. Les agencements mis en place par Jean vont permettre à la ville de résister à 40 jours de bombardements et à sa garnison, épuisée et réduite de 10,000 à 3,000 hommes de capituler avec les honneurs.

Il n'en faut pas plus pour que Jean soit nommé général de brigade.

Il combat sur les côtes de l'Ouest lorsque Bonaparte l'appelle à ses côtés pour lui confier le commandement en chef de l'arme du Génie en Italie. C'est lors de la retraite de nos troupes, pourchassées par l'autrichien jusque sur notre sol, que Jean va sauver la situation en fortifiant le Var et le rendant infranchissable. L'ennemi n'entrera pas en Provence.

Inspecteur général de l'armée et commandeur de la légion d'honneur en 1804, il est nommé sénateur l'année suivante et fait comte de l'empire en 1808.

Proche de Talleyrand, il est de ceux qui vont obtenir du sénat, le vote de la déchéance de l'empereur et du retour des Bourbons. Louis XVIII, qui sait reconnaître les siens, le fait chevalier et pair de France.

Jean aura la décence et le courage de s'abstenir de voter dans l'ignoble procès du Maréchal Ney et passera le reste de ses jours entre Paris et Tarbes, laissant l'image d'un sénateur des plus discrets.

Pair de France et sénateur, chevalier de St Louis et grand officier de la légion d'honneur, le général de division Dembarrère s'éteint en 1828.

En 1836, ayant appris que son nom ne figurait pas au nombre des 344 gravés sur les piliers de l'arc de triomphe, sa famille fera part de son étonnement à qui de droit. Le nom de Dembarrère sera inscrit, en 1841, avec 243 autres dont le général Hugo, rappelé à la mémoire du ministre par un joli poème lyrique de son fils évoquant l'arc et dont je ne résiste pas à vous livrer la chute aussi acerbe que délectable: «je ne regrette rien devant ton mur sublime que l'absence de Phidias et du nom de mon père.»

Ce Victor, quand même !

Pour les curieux, l'inscription est sur le pilier Nord.





William : « éducateur et poète»

Née en 1815, Mary Theresa Vidal, née Johnson est l'arrière-grand-mère de Papapa.

A 25 ans, elle embarque pour l'Australie avec ses 3 enfants et son pasteur de mari qui a décidé d'y exercer son ministère. Décidée à apporter sa contribution à l'évangélisation de cette nouvelle colonie, elle publie, en 1844, the tales of the bush, série de contes édifiants destinés à apprendre le bienfait des vertus chrétiennes aux autochtones et migrants incultes. Cet ouvrage lui confère la place, incontestée, de première romancière australienne.

Son frère William, suit de brillantes à Eton puis au King's College de Cambridge où il rafle tellement de prix de versifications anglaise et latine, que son ancien collège lui propose, dès son diplôme en poche, de rejoindre les rangs de ses enseignants.

Nommé, en 1844, Assistant Master à Eton. Il y restera 28 ans. Deux ans plus tard, William, School et House Master cumule sa fonctions de professeur avec celle de direction de sa maison de pension d'old Christopher's où il loge plusieurs de ses élèves.

Souhaitant se consacrer au seul enseignement et épuisé, parce que de santé fragile, il propose aux époux Vidal, de revenir en Angleterre. Il est décidé à leur céder sa maison de pension à la condition qu'ils en prennent la responsabilité. Les Vidal s'installent à Eton en 1851.

Celui que des générations d'élèves surnomment « tute », le tuteur, peut, enfin s'adonner à l'écriture et publier, en 1855, un recueil de 45 poèmes regroupés sous le titre de Ionica. C'est à lui, aussi qu'Eton doit la célèbre Eton Boating Song, qu'il écrit en 1863.

En 1872, une sombre histoire de lettre adressée à l'un de ses élèves, Reginald Brett, met la tempête dans l'Ecole. William choisit de démissionner. Il change de nom pour prendre celui de sa grand-mère : Cory, passe quelques années en Devon, publie 25 nouveaux poèmes, parus sous le nom de Ionica II, en 1877 puis embarque pour Madère l'année suivante. Il y séjourne cinq ans, s'y marie et revient, avec femme et fils s'installer à Hampstead, où il décède en 1892.

En 1924, Reginald Brett, devenu Vicomte Esher, est un homme influent, aide de camp du roi et l'un des promoteurs de l'entente cordiale. Il publie Ionicus, en hommage à la vie et à l'oeuvre de l'auteur de Ionica. Lord Rosebery, Lord Balfour et Lord Asquith, tous trois locataires en leur temps, du 10 Downing Street et anciens élèves de William Cory, y écrivent, dans la dédicace, avoir appris, à Eton, de nobles et hauts principes politiques au travers de l'enseignement de Ionicus.

William Cory écrivait : vous n'étudiez pas tant dans cette école pour acquérir des connaissances que pour développer votre attention et votre esprit critique. Il suffit, en effet de qualités intellectuelles moyennes pour apprendre et retenir. L'essentiel est d'acquérir arts et habitudes : l'habitude de prêter attention, l'art de s'exprimer, l'art d'assumer une nouvelle position intellectuelle à un instant clef, l'art d'entrer rapidement dans les pensées de l'autre, l'habitude de soumettre vos propos à la censure et à la contestation, l'art de faire part de son assentiment ou de son désaccord en termes mesurés.

Vous êtes dans cette école pour apprendre à vous construire et à vous connaître.

J'en connais une qui parlerait de propos scandaleusement élitistes, dénués de sens commun.et si loin de l'Ecole de la République … !





George : «so, so British »

Charles Johnson Vidal, grand-père de Papapa, avait un frère officier de marine, un autre major dans l'armée des Indes, deux étaient clergymen … rien que de très courant dans la gentry... et puis il y avait George....

Ses parents y étant propriétaires de la maison de pension d'Old Christopher's et son oncle William professeur, George suit toute sa scolarité à Eton de 1854 à 1861. Brillant sportif, il excelle en double sculls et c'est dans cette discipline, comme barreur du Victory, qu'il remporte la boat race du collège en 1861.

Le champion étant doublé d'un brillant élève, George n'a aucune difficulté à se faire admettre au King's College de Londres pour y poursuivre ses études supérieures.

Souhaitant exercer la profession très fermée d'avocat, il se doit d'intégrer l'une des quatre Inns of Court, seules habilitées, alors, à former et à nommer les «barristers» et, c'est sans problème qu'il est admis à Lincoln Inn.

Parallèlement à ses études, il passe le concours de l'Indian Civil Service. Reçu premier de sa promotion, il est affecté à la Présidence de Bombay en 1867 et mènera, jusqu'à sa retraite, une carrière de haut fonctionnaire. Lorsqu'il se retire, en 1897, il est Secrétaire Général du Gouvernement et membre du Conseil Législatif de Bombay.

Passionné d'études environnementales, il est reconnu comme un grand spécialiste des oiseaux et serpents du sous continent indien et publie nombre d'articles dans des revues spécialisées.

En 1873, il lance le badminton en Inde et consacrera beaucoup de temps et d'énergie au développement de ce sport. De retour en Angleterre, il remportera à quatre reprises, le Veteran doubles championships. Secrétaire et Trésorier de l'Association de Badminton britannique de 1899 à 1906, il en devient le Président en 1907. Par son action, le nombre de clubs passera, pendant ces huit années, de 30 à 200.

Tennisman à ses heures, il remporte à deux reprises, le All England Veterans et fut, une fois, sélectionné pour la compétition en simple.

Amateur de photographie, il collectionne les prix et récompenses.

Vivant, aussi, avec son temps, il conduit lui-même son automobile et participe à de nombreux rallyes. C'est au cours de l'un d'eux, en Normandie, qu'il attrape un coup de froid dont il ne se remettra pas et qui l'emportera.

En 1877, Lincoln's Inn l'avait «called to the bar». Revenu à Londres, il aurait pu mener l'existence bourgeoise des ténors du barreau, mais il préféra rester à Bombay pour se consacrer à ses multiples passions indiennes.





Joshua «  Joshua fit the battle of rien du tout »


Elizabeth Reynolds, épouse Johnson, ancêtre à la 7ème génération de Papapa, avait un frère peintre.

Tout a été écrit, bien mieux que je ne pourrais le faire sur le très célèbre Sir Joshua Reynolds, premier président de la Royal Academy, anobli par son souverain.
 
Je me contenterais d'une historiette dans l'historiette.

William Johnson, qui s'était mis en tête de devenir maître de forges, ne réussit pas vraiment dans cette aventure.

A défaut de fondre le fer, il fait fondre les quelques milliers de livres prêtées par Joshua pour l'aider à réaliser son projet et s'ouvre de la chose à son beau-frère, reconnaissant être dans l'incapacité de les re-solidifier pour les lui restituer.

« Dont acte » rétorqua le flegmatique Joshua dans son anglais le plus parfait.

Comme me l'écrivit, dans son français, le Révérend de la paroisse de Torrington, avec lequel nous correspondions : « William faisait souvent défaut, mais ses enfants furent industrieux et honnêtes »

C'est probablement pour cette raison que Joshua léguera 100,000 livres à sa nièce bien aimée, Mary, fille de son autre sœur, Mary, épouse Palmer.

Avec son panier de sterlings sous son bras, Mary 2 Palmer went to the market aux prétendants et décidera de redorer le blason du très noble Murrough O'Brien, 5ème comte d'Inchiquin et 1er marqui de Thomond, un fringant noceur de 66 ans, criblé de dettes, joueur invétéré et dont l'amour de la dive bouteille lui valait le surnom de « six bottle man ».

La jeune sœur de Mary, épouse du très sage Robert Gwatkin, « a true roast beef of old England » recevra 10000 livres, quelques intimes se partageront plusieurs dizaines de milliers de livres et l'infortuné William Johnson, fils de William et d'Elizabeth héritera de .... la montre et du sceau de Joshua ….

Comme quoi, bien mal acquis, etc …...

dimanche 31 mai 2015

EricDubruel enfin ... voici Pierre-Antoine !


 Pierre, Antoine, Etienne à Martignas-sur-Jalles, le 28 juillet 1726, n'apparaît qu'à une ou deux reprises comme témoin signataire d'actes paroissiaux de cette paroisse et l'on ne sait rien de lui jusqu'à une lettre qu'il écrit à son oncle, Jean-François, médecin à Tournon d'Agenais. Celle-ci,  communiquée par Pierre-Antoine le contemporain, nous apprend qu’à vingt ans, notre ancêtre participe à la guerre de Succession d’Autriche en faisant campagne dans les Flandres. Il appartient aux services de chirurgie des armées et exerçait probablement comme « frater », c’est à dire compagnon d’un chirurgien militaire.

Il est certain  qu'il doit sa position au dit Jean-François, médecin introduit dans l'aristocratie Gasconne et Bordelaise, lequel l'avait probablement pris sous sa protection. La teneur et les propos de la dite lettre démontre, en effet, une intimité certaine entre les deux hommes, teintée de connivence. A n'en pas douter, ces deux là se connaissaient bien.

Le 10 mai 1746 l’armée française quitte Bruxelles, occupée depuis le 21 février, et prend la route du Nord. Le 11, elle campe à Stein avant de se diriger, dès le lendemain vers Malines que l’ennemi abandonne dans la matinée du 14. L’après-midi du même jour, le comte de BELLE-ISLE, lieutenant-général, et le prince de ROHAN, maréchal de camp, prennent possession de la ville avec 3 brigades d’infanterie.

Le 15, le Roi y fait son entrée en ville, et y établit son quartier ;

Le 17, Pierre-Antoine écrit à son oncle Jean-François-Hilaire :  « Je n’aurai pas différé si longtemps de vous écrire, mon cher cousin, si l’apparence où nous étions d’une prochaine bataille ne m’eut occasionné ce retardement, mais comme les ennemis n’ont aucune envie d’en venir aux mains avec nous, je crois qu’il n’y aura que quelque petit choc. J’ai vu depuis la grande tour de Malines (La tour saint Rombaut, haute de 58 mètres domine la plaine à perte de vue) une escarmouche avec nos hussards et ceux de la reine de Hongrie, nous y avons pris 200 prisonniers qu’on a conduit en France et il y a eu un capitaine du régiment de Grassin tué, et un lieutenant blessé à mort, un capitaine du régiment de la Morlière a eu une jambe emportée d’un coup de canon et le même boulet a aussi emporté la jambe à un soldat qui, par bonheur s’est trouvée de bois, ainsi il en est quitte pour une autre jambe et pour une secousse dans la cuisse ; les ennemis se retirent sous le canon et notre armée pour aller les attaquer ; je crois qu’ils seront en cette circonstance comme le Gascon qui voulait les éviter, avec cette différence que celui-ci voulait leur couper le… et que les autres n’ont pas envie autant d’attendre pour cela faire : c’est impossible qu’ils puissent résister à notre armée qui est forte de cent quatre vingt mille hommes. On ne peut rien voir de plus beau que la maison du roi. On dit aussi qu’après la cour de France, on doit tirer des messes.

Les Flamands sont des gens fort mauvais. Il n’y a que les femmes qui sont un peu sociables. J’ai dans mon hôpital une jeune flamande à qui j’enseigne le français, et en revanche, elle m’apprend le flamand. Elle a fait beaucoup plus de progrès que moi, elle me fait du thé tous les matins, que je prends avec elle, et du café pour l’après dîner. Je souhaite de pouvoir rester longtemps dans ce même hôpital, mais comme nous sommes obligés de suivre l’armée, je crains que nous partions demain ; enfin, il faut prendre patience, et se consoler en buvant à la santé de nos armées, et à la votre avec cette bonne bière. Parlez-moi de cela, non pas de votre mauvais vin de Cahors. Si pourtant vous voulez en faire de même à mon égard, je vous serai bien obligé. Je ne manquerai point de vous écrire dès qu’il y aura quelque chose de nouveau, et je place ici les assurances de mon affection respectueuse à mes très chers cousins, famille et tantes, mes civilités très humbles à tous mes oncles, tantes et cousines et amis, pour quant à vous je suis toujours avec un attachement parfait, mon cher cousin, votre très humble et très obéissant serviteur et cousin.

et il n'est pas peu fier de préciser : Mon adresse est : Dubruel, chirurgien au quartier du roi.

Je suis fort content Dieu merci, j’ai de bons appointements, et je travaille beaucoup. Je vous prie, quand vous écrivez à mon oncle, de lui fournir de mes nouvelles, et j’attends des vôtres avec impatience. On vient d’investir le fort de sainte Marguerite. »


Deux siècles et demi plus tard, et pour habiter les Flandres depuis longtemps, je dirais que les Flamands restent des gens très particuliers, qu’il est vrai que les Flamandes ont longtemps eu la réputation d’être très « sociables » et qu’une bonne bière belge vaut sans conteste un vin médiocre, fut-il de Cahors ; quant aux compétences particulières attribuées à « Frida la blonde », elles relèvent, à l’évidence, d’une expérience ponctuelle et personnelle qui n’engage que son auteur.

Pierre-Antoine était bien informé : l’armée du Maréchal de SAXE quitte, effectivement, Malines dès le lendemain pour gagner Boudrout, où elle campe le soir même avant de reprendre sa route vers Rants. A côté de l’armée du Prince de CONTI qui conduit les sièges des citadelles et mène une guerre classique, l’armée du Maréchal est chargée de la « petite guerre » dont l’objet est de tenir la campagne, d’y observer les démarches de l’ennemi, de le harceler dans tous ses mouvements, de le dérouter, ou du moins de le gêner, d’intercepter les convois et les courriers, etc et de savoir dans tous les cas suppléer à l’infériorité du nombre

Les Hongrois évoqués dans le courrier sont des adversaires redoutables, car, à en croire le Comte de LA ROCHE, colonel de dragons à l’époque : « Ils semblent être naturellement destinés à la petite guerre ; les hommes sont lestes, sobres, adroits et vigoureux. Dès la plus tendre enfance, ils s’exercent à manier les chevaux et l’arme blanche, et leurs chevaux semblent être préparés par la nature pour ce métier. » 

Côté Français, la petite guerre est l’apanage de troupes légères, levées pour l’occasion et composées essentiellement de volontaires. Ainsi les « arquebusiers de GRASSIN » dont les 900 fantassins et 300 cavaliers avaient été levés en 1744 par Simon-Claude de GRASSIN et les « fusiliers de La MORLIERE », dont les 1.060 fantassins et 540 dragons l’avait été en 1745 par Alexis MAGALLON de La MORLIERE.

Clin d’œil, au passage, à mon regretté oncle Jean-Paul ROUANET, qui n'ignorait certainement pas que ces deux régiments avaient, au fil des ans et par cumul de fond, constitué les chasseurs de Bourbon, basé à Gray en 1814. Licencié en 1815 ce régiment aurait pu renaître partiellement de ses cendres pour rejoindre le 14ème chasseur formé en 1819 à Pontivy et devenu 9ème chasseur en 1831. Comme quoi les chasseurs ont toujours été en première ligne de Malines à Berchtesgaden… !

Ce n’est probablement pas par seul patriotisme que Pierre-Antoine a rejoint l’armée car, comme le souligne le professeur MASSE, ancien professeur de chirurgie à la Faculté de médecine de Bordeaux et historien des chirurgiens bordelais : « pour avoir une chance de faire une belle carrière chirurgicale sous l’ancien régime, il était préférable d’avoir eu une expérience militaire. C’était là qu’on voyait le plus d’exemples d’opérations complexes étant donné que la chirurgie était avant tout traumatologique. Outre l’expérience technique, l ‘armée permettait de se faire des relations fort utiles qui pouvaient jouer tout au long d’une vie. »

De fait, l’expérience militaire de Pierre-Antoine sera de courte durée puisque, dès 1747, ce même historien le signale comme premier garçon interne à l’hôpital Saint-André de Bordeaux, fonction qu’il occupera jusqu’en 1750.

« La formation de chirurgien débutait par un apprentissage de 2 ans auprès d’un maître qui conduisait au premier examen de « grande expérience. », suivi de deux autres (oraux ) sur les principes généraux de l’art et les plaies et ulcères. Le quatrième et, dit « d’entrée en semaine », portait sur
- les principes généraux de l’anatomie et des épreuves pratiques sur des parties du corps humain ou animal « convenables »,
-les opérations de tumeurs, plaies, amputations, trépans, hernies, abcès..
-la théorie de la saignée,
-les médicaments, baumes, huiles, cataplasmes et emplâtres. les principes généraux de l’anatomie et des épreuves pratiques sur des parties du corps humain ou animal « convenables »,
-Le cinquième et dernier examen, passé devant médecins et chirurgiens portaient sur le fait pratique. Toutes ces étapes franchies, le postulant accédait à la maîtrise. »

Depuis 1723, la qualité de Maître ès Arts était exigée des candidats au titre de chirurgien. Ce diplôme sanctionnait deux années d’études universitaires en philosophie et humanités et donnait le droit d’enseigner.

Pierre-Antoine s’en va donc parfaire sa culture à la faculté des Arts de Montpellier, toute proche de l’Ecole de médecine dont était issu Jean-François-Hilaire. Il y décroche son diplôme comme l’attestent les registres de l’Université :  « Petrus Antonius DUBRUEL chirurgicus martiniasensis diocesis Burdigalensis al liberiarum artum et philosophiae magisterium est promotus die 4 februari 1751. »

De retour à Bordeaux, il est immatriculé au rang de Maître en chirurgie de la ville le 4 mai 1752.

Quinze jours seulement après le décès de son père à Martignas, Pierre-Antoine épouse, le 14 novembre, Antoinette HUGON. De près de dix ans sa cadette, elle est la fille d’un maître fourbisseur ( armurier en armes blanches ).

Leur contrat de mariage, passé devant maîtres PERRENS et BANCHEREAU, est daté du 11. « Aujourd’hui, onzième du mois de novembre 1752, après midi devant nous notaires à Bordeaux soussignés ont comparu Sieur Antoine DUBRUEL, maître ès arts et chirurgien juré de la présente ville y demeurant, paroisse saint Projet, fils légitime de feu sieur Jean DUBRUEL, chirurgien et de demoiselle Pétronille RAYMOND, procédant du consentement de la dite demoiselle sa mère, suivant l’acte du huitième du présent mois, retenu par ALLIQUE, notaire royal, lequel le dit sieur nous a remis après avoir signé en marge « ne varietur » pour demeurer annexer à la présente et être passé aux expéditions qui en seront délivrées d’une part.

Et demoiselle Antoinette HUGON, fille légitime de feu sieur Jean HUGON, maître fourbisseur et de demoiselle LARGETTEAU, procédant du dit consentement de cette dernière, ici présente et consentante, de l’avis et consents de sieur Henri HUGON, son frère, du sieur BRULATOUR, maître armurier de la présente ville, son oncle par alliance, de demoiselle Pétronille LARGETTEAU, sa tante, épouse du dit sieur BRULATOUR et d’autres, ses parents et amis soussignés ici présents, d’autre part.

Lesquels dits, Pierre-Antoine et Antoinette HUGON, ont promis de se prendre l’un l’autre pour mari et femme, légitimes époux et entre eux solenniser le saint sacrement du mariage en face de notre mère sainte Eglise catholique, apostolique et romaine, lorsqu’une partie en sera requise par l’autre à peine de tous dépends, dommages et intérêts. En faveur et contemplation duquel mariage et pour aider à en supporter les charges, la demoiselle LARGETTEAU, mère de la demoiselle future épouse, a donné et constitué en dot à la dite demoiselle HUGON, sa fille, tant de son chef que de celui du feu sieur HUGON, son époux, la moitié de tous ses biens immeubles qu’elle a actuellement, aura lors et au temps de son décès, se réservant l’usufruit et jouissance pendant son vivant et en outre la somme de 1.000 livres de principal pour en faire et disposer à son plaisir et volonté et en recevant le dit futur époux les biens et droits de la dite demoiselle future épouse de même que toutes les autres sommes et biens qu’il pourrait recevoir dans la suite y sera tenu de les lui reconnaître et assigner, comme il les lui reconnaît et assigne dès à présent. Reçu qu’il l’ait sur tous ses biens meubles et immeubles présents et à venir pour lui être le tout censé nature d’immeuble à elle et aux siens et à ceux de son……… et lègue sujette à réversion si le cas y était conformément à la coutume

Seront associés les dits futurs époux, par moitié à tous les acquêts meubles et immeubles que Dieu leur fera la grâce de faire ou acquérir pendant leur présent mariage, lesquels acquêts appartiendront aux enfants qui en seront procréés, sauf aux dits futurs époux de pouvoir avantagé chacun de leur moitié celui ou ceux de leurs enfants que bon leur semblera ; et n’y ayant d’enfant chacun pourra disposer de sa dite moitié l’un en faveur de l’autre ou autrement ainsi qu’ils aviseront ; l’usufruit du total des droits acquets réservé au survivant des dits futurs époux leur vie durant, enfants ou non, lequel survivant gagnera sur les biens du premier décédé d’eux la somme de 1.000 livres de laquelle le prémourant fait don et donation au survivant pour gain de noces et agencement. A été convenu que les dits futurs époux demeureront dans la maison de la dite demoiselle LARGETTEAU, mère de la dite demoiselle future épouse, pendant quatre années à compter du jour de la bénédiction nuptiale, pendant lequel temps, la demoiselle LARGETTEAU promet de loger et nourrir les futurs époux à son ordinaire et les enfants qu’il plaira à Dieu de donner aux futurs époux et, à la fin du dit délai, la dite demoiselle LARGETTEAU promet de payer aux futurs époux, en avancement de la constitution de la moitié de ses biens immeubles qu’elle a faite à la demoiselle sa fille, la somme de 2.000 livres, laquelle les dits futurs époux seront tenus de rapporter ou précompter lors du partage des biens immeubles de la dite demoiselle LARGETTEAU, mère de la future épouse et pour l’entretenement de ce décès, les parties ont obligé tous leurs biens meubles, présents et à venir, qu’elles ont soumis à toute rigueur de justice. »

Est jointe en annexe le document suivant, reçu par maître ALLIQUE, notaire à Gradignan : « Aujourd’hui, huitième jour du mois de novembre 1752, par-devant le notaire de Guyenne soussigné, présents les témoins bas nommés a été présente demoiselle Pétronille RAYMOND, veuve de feu sieur Jean DUBRUEL, chirurgien, habitante de la paroisse de Martignas.

Laquelle volontairement a consenti, par la présente, a contrat de mariage proposé entre sieur Pierre-Antoine DUBRUEL maître ès arts et chirurgien juré de la ville de Bordeaux, son fils avec demoiselle Anne Toinette HUGON, que monsieur le curé ou le sieur vicaire de la paroisse où ils se trouveront habitant leur donnent la bénédiction nuptiale en observant les formalités prévues par le saint canon et, par là, promettait la dite veuve DUBRUEL, avoir le tout pour agréable et comme étant ainsi sa volonté dont acte requis fait et passé dans la paroisse de Martignas, maison de la dite veuve DUBRUEL, présents François CAZAUX et Guillem LAGURGUE, laboureurs.»

 
Peu de témoins assistent à la conclusion du contrat et tous sont de la famille de la mariée. Les fourbisseurs et armuriers ayant une clientèle essentiellement composée d’aritocrates, des Bourgeois de Bordeaux, qui ont le droit de porter l’épée depuis le XVème siècle et de militaires, il y a fort à parier que certains clients de sa belle-famille viennent grossir le nombre des patients de Pierre Antoine.

Le 16 mars 1753, il prête serment devant la jurade de la ville, « après avoir subi les examens ordinaires. » La liste de Messieurs les Maîtres en chirurgie de la ville de Bordeaux, établie la même année par le greffier Bertrand DUTOYA le domicilie rue Marchande, ce qui est conforme aux dispositions de son contrat de mariage aux termes duquel le jeune ménage devait être logé chez la mère de la mariée.

L’Ecole de Chirurgie de Bordeaux se crée alors sur l’initiative des chirurgiens de la ville qui avaient reçu, par Lettres Patentes royales datées du 8 septembre 1752, l’autorisation de construire un amphithéâtre.

Louis XV avait pris l’Ecole sous sa protection et ordonné qu’il y soit établi cinq professeurs et démonstrateurs royaux nommés par la Communauté, mais présentés à son premier chirurgien. En conséquence le corps professoral était réputé être :  «  nommés et agrégés par le roi. »

G. PERY, auteur d’une «  histoire de la faculté de médecine de Bordeaux », mentionne notre ancêtre à plusieurs reprises :

Sur la manière dont il a été coopté : « Le 15 février 1755, la communauté des chirurgiens de Bordeaux, assemblée sur la convocation du lieutenant BALLAY, procède à la nomination de Pierre-Antoine DUBRUEL comme démonstrateur d’ostéologie et maladie des os, à la place de M. FAURE fils, absent. »

Sur la publicité faite autour de sa première intervention : « 11 avril 1755, ouverture de l’amphithéâtre ; M. DUBRUEL, professeur et démonstrateur, traitera de l’ostéologie, des maladies des os et démontrera les opérations qui leur conviennent, ainsi que les appareils et instruments qui y sont nécessaires, ce qui sera continué le mardi et vendredi de chaque semaine, aux écoles de chirurgie, rue Lalande, près l’Annonciade. Défense est faite aux étudiants d’y entrer avec épée, bâton, canne, sous peine de punitions. »

Et enfin, sur sa première leçon officielle : « 20 juin 1755, la communauté représentée par 30 chirurgiens, le lieutenant en tête, vint assister à l’ouverture des leçons de M. DUBRUEL. »

 L'année suivante, à seulement trente ans, il devient membre de la Société de Chirurgie de Bordeaux dont il sera successivement Syndic, 1er puis 2ème prévot et ,enfin, inspecteur.

Sa notoriété va grandissante : le 3 avril de la même année, il prête à nouveau serment devant la jurade, en qualité de chirurgien commis aux rapports, équivalent de nos médecins légistes. Le voici chargé de visiter les blessés, de constater les causes de décès autres que naturelles, de procéder aux autopsies requises par la justice et d’établir et remettre le rapport de ces opérations à la maréchaussée ou à toute autre autorité chargée d’enquêter.

1765 : comme tous les riches bourgeois bordelais de l’époque, Pierre-Antoine va se porter acquéreur de vignobles. Il jette son dévolu sur une terre de Fargues, au cœur du Sauternais, village du célébrissime Château Yquem, où il achète une parcelle de 114 journaux, soit près de six hectares.

« par devant les conseillers du Roi, notaires à Bordeaux soussignés et en présence du Sieur Pierre BROUGNIOU, homme d’affaires agissant pour ce au nom de Messire Joseph de GASQUES, seigneur et Marquis de Clermont et de l’Isle Bouzon et autres lieux, lequel au dit nom a par les présentes vendu à sieur Pierre Antoine DUBRUEL DEBROGLIE, maître chirurgien au collège de Bordeaux, y habitant place et paroisse St Projet, ici présent et acceptant pour lui, ses hoirs et ayant cause.
 
Savoir les biens que le seigneur marquis de Clermont jouit et possède dans la paroisse de Fargues près Langon en Bordelais et paroisses voisines s’il y en a. Consistant en maison pour le maître et le cultivateur, chais, cuvier et autres bâtiments, jardin, trois métairies, granges, parcs à bestiaux, eyzines, terres labourables, vignes plénières, joualles, prés, châtaigneraies, bois taillis, pignades, landes bruyères et autres natures de fonds, le tout attenant de la contenance d’environ 114 journaux et de quelques autres étendues.

Sont compris dans la présente vente toutes les rentes et redevances attachées aux dits biens. Sont aussi compris dans la dite vente tous les meubles meublants et effets mobiliers de quelconque nature qu’ils soient dans les bâtiments ou autres lieux des dits biens fonds et dépendances de Fargues appartenant au dit seigneur marquis de Clermont : ensemble les bestiaux, charrettes, outils aratoires et autres objets sans pas une exception, compris dans le bail à ferme des biens de Fargues et dépendances consenti par le seigneur marquis de Clermont au sieur CASTAING, lequel doit la taille et les effets qu’il doit rembourser.ur CASTAING a été chargé.

Cette vente est réalisée, moyennant la somme de 16.000 livres dont 4.000 sont versées par Pierre-Antoine le jour de la signature de l'acte, "les 12.000 livres restantes, le sieur DUBRUEL promet et s’oblige de les payer au dit seigneur marquis de Clermont, à savoir, 6.000 livres dans six ans en deux termes égaux et les autres 6.000 livres, dans dix ans le tout à compter du jour avant février chaque année et à compter de la St Jean avant jour de la Vierge, ne pouvant être acquitté qu’en espèces d’or ou d’argent sans aucun papier, billet, ni effets royaux qui pourraient avoir cours et autres paiements en vertu des lois du roi et aussi du Conseil."

Le seigneur de ces terres n'est pas Monsieur de GASQUES car ce dernier les tient en censine de monsieur le marquis de JALAY, co-seigneur de Fargues, auquel il verse 34 sols de rente annuelle de foncier ... croix de bois, croix de fer, ". Les dites terres vendues sont quittes des arrérages et de tous autres droits seigneuriaux du passé jusqu’à ce jour"

Yes, but ....le marquis de JALAY, informé de la vente, fait savoir que les fonds et immeubles vendus sont assujettis envers lui de 10 sols par journal, chaque année, ce qui change la donne car 10 sols x 114 journaux =1.140 sols, soit 57 livres de droits seigneuriaux annuels .... le seigneur marquis de Clermont dénie formellement et déclare que la totalité est à ce jour chargée annuellement de la rente de 34 sols,
Méfianr, Pierre-Antoine fait acter qu'il ne sera tenu de payer les 6.000 livres de la dixième année qu’à condition que le seigneur marquis de Clermont lui rapporte, en bonne forme, le traité passé entre les dits seigneurs ou le jugement en dernier ressort justifiant que les biens vendus ne sont chargés que de la rente de 34 sols par an envers le seigneur de Fargues ou autre quelconque. A défaut monsieur de GASQUES fera une diminution de 3.000 livres sur le prix de la présente vente à imputer sur les 6.000 livres du dernier pacte pour indemniser le sieur DUBRUEL de la diminution qu’essuiera le dit bien par une aussi forte vente.
 
 Bien lui a pris de se montrer méfiant,  car monsieur de GASQUES, qui avait certainement la tête ailleurs le jour de la rédaction de l'acte, ne trouvera jamais dans les tiroirs de ses innombrables commodes ou bureaux meublant ses châteaux, ni accord, ni jugement justifiant de l’exonération des 10 sols de droits seigneuriaux dus au seigneur de Fargues, et donnera quittance de l'entier paiement en juin 1771. 

Les affaires fiscales relevant des Elections, Pierre Antoine se rendit dans les bureaux de celle de Guyenne, pour faire valoir l’un de ses privilèges fiscaux de Bourgeois de Bordeaux et réclamer l’exemption de taille sur son nouveau bien. Subsidiairement il informait les collecteurs qu’il ne fallait plus espérer faire payer CASTAING dont il avait décidé de se passer.

Aujourd’huy premier juillet mil sept cens soixante cinq, a comparu au greffe de l’election de Guyenne, sieur Pierre Antoine Dubruel de Broglie, professeur en chirurgie au college de Bordeaux, y habitant, place et parroisse Saint-Projet.
Lequel a dit que par contrat du dix neuf juin dernier retenu par Faugas & son confrere notaire à Bordeaux, il auroit acquis de sieur Pierre Brougnaun homme d’affaires et agissant pour et au nom de messire Joseph de Gasquet, seigneur marquis de Clerrnont et de Lisle Bouzon et autres lieux, fondé de sa procuration specialle, savoir est : tous et uns chacuns les biens que ledit seigneur marquis de Clermont jouissoit & possedoit dans la parroisse de Fargues près Langon,concistant en maison pour le maitre et pour les cultivateurs, chay, cuvier et autres batiment, jardin, trois metairies, granges, parcs à bestieaux, eyzines, terres labourables, vignes, pleniers, joualles, preds, chataigniers, bois taillis, pignadas, landes, brugeres et autres nautres1 de fonds. Lesquels biens estoient affermé au sieur Castaing, de Langon, pour raison de quoi ledit Castaing est imposé sur le rolle de taille de la parroisse de Fargues jurisdiction, à une somme de quatre vingt une livres. Et comme le comparant est exempt de taille et veut jouir de son privilege, il fait le present acté pour le denoncer avec le sus dit contrat d’acquisition au sindic de ladite paroisse de Fargues, afin qu’il ait à en avertir les collecteurs quy entreront en charge l’année prochaine 1766, de cesser la cottisation quiest faite sur sur (!) leur dit rolle sous le nom dudit sieur Castaing comme fermier dudit bien fonds, et n’ayent à n’en faire aucune sous son nom ni sous quels termes ou denomination que ce puisse etre. Leur declare en outre, ledit sieur comparant, que lesdits biens fonds ayant été degradés par le fermier, vouloir les faire cultiver sous sa main par valets à gages et gens de journées. Protestant, que si, au prejudice du pressent acte, lesdits collecteurs venoient à continuer ladite cottisation et en faire quelque autré, de se pourvoir contre eux, à peine de nulité et cassation d’icelles et de tous despens, dommages et intérêts.

  
En 1768, Professeur aux Ecoles, il est mentionné à deux reprises dans l’almanach de Bordeaux
- comme  chirurgien major en chef de l’hôpital St André, établissement constitué de bâtiments hétéroclites parmi lesquels on retrouve boucherie, boulangerie, chai à bois, salle d'examen pour les femmes, apothicairerie, réfectoire des sœurs et salles des malades.
D'une capacité d'accueil d'environ 384 malades pour 258 lits dont certains étaient à deux, voire à trois places, son personnel se composait de deux médecins, deux chirurgiens majors, quatre chirurgiens internes, vingt-quatre sœurs de la Charité et vingt infirmiers des deux sexes.

- et comme chirurgien-major de l’amirauté de Guyenne, position qu lui permit de favoriser la carrière de son neveu Antoine, fils cadet de son cousin bienfaiteur, qu'il fera embarquer au moins, à cinq reprises : deux fois à destination de la Martinique sur le Protecteur, le 19 novembre 1764, puis sur la Confiance, le 8 novembre 1765, pour St Domingue, le 19 mars 1768, sur le Don de Dieu , deux fois enfin pour la Guinée, sur le Glaneur, le 4 mars 1770, puis le 9 février 1772 sur ce même navire rebaptisé le Gladiateur. Nous apprécierons à leur juste valeur, le choix de ces deux derniers noms, si délicatement évocateurs pour désigner un navire négrier qui se livrait au « commerce triangulaire » entre Bordeaux, l’Afrique Noire et les Antilles.

Comme le soulignait le Professeur MASSE, déjà cité  : « il ne faut pas s’obnubiler et considérer que tous les chirurgiens navigants d’alors n’étaient embarqués que sur ce genre de bâtiments. Néanmoins, l’intérêt médical de ces navires trafiquants en « bois d’ébène » est grand, car ce type de vaisseaux avait impérativement besoin de chirurgiens : si l’armateur voulait que sa croisière commerciale, un peu spéciale, soit rentable, il était indispensable de conserver en bonne santé cette précieuse marchandise qu’étaient les noirs transportés. Aussi, sur ces navires, ceux-ci étaient l’objet de tous les soins médicaux possibles à l’époque. De fait, ils étaient mieux soignés que les marins de l’équipage, beaucoup moins intéressants sur le plan financier. »

Ce type de carrière procurait quelques avantages, si l’on en croit le même auteur qui poursuit : « ces chirurgiens de marine constituent une pépinière remarquable, car outre l’expérience acquise, ils pouvaient s’installer ultérieurement et sans examen. Leur formation initiale avant leur embarquement était probablement sommaire, mais cependant vérifiée par un examen passé devant les chirurgiens de l’amirauté. » Comment s’appelait celui de l'amirauté de Bordeaux déjà ??

"Le 14 mai 1770, Pierre-Antoine ne voyant pas venir le premier liard du solde de la dot de sa femme, pas plus que le remboursement de sommes qu’il avait prêtées à sa belle-maman, perd patience et décide de faire opposition, par acte passé devant ses notaires PERRENS et FAUGAS, sur les loyers que celle-ci encaisse de ses locataires. Ce n'est pas parce que l'on a de la fortune que l'on ne doit pas récupérer son dû. 

« Par devant les conseillers du Roy, notaires à Bordeaux soussignés, fut présent Sieur Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLIE, professeur en chirurgie de Bordeaux, y demeurant paroisse ST Siméon. Lequel a dit qu’il est créancier de la demoiselle LARGETEAU, veuve du Sieur HUGON, sa belle-mère, 1° d’une somme de mille livres de capital pour reste de la constitution dotale par elle faite à la demoiselle épouse du dit comparant portée dans leur contrat de mariage, ensemble dus les intérêts de la dite somme . 2°de la somme aussi de capital portée en un contrat d’obligation passé devant BANCHEREAU, notaire, dont le délai, quoique très long est échu depuis près de trois ans ; 3°, enfin, d’une autre somme au terme du règlement passé entre eux et quoique toutes les dites sommes soient exigibles depuis fort longtemps et que le sieur comparant en ait souvent fait la demande à la demoiselle sa belle-mère, en lui faisant connaître les emplois avantageux qu’il voulait en faire quoiqu’il n’y soit nullement tenu. Elle n’a voulu, cependant, n’y avoir aucun égard, ni profiter des occasions qui se sont présentées pour lui procurer les fonds nécessaires pour payer le sieur comparant. Cette indifférence de la part de la dite dame a véritablement touché le sieur comparant, mais son respect et ménagement pour elle et l’éloignement qu’il a pour les actes rigoureux, l’ont empêché, jusqu’à présent de faire usage pour se procurer son paiement et il ne s’y déterminera même qu’avec la plus grande répugnance quoique la demoiselle sa belle-mère lui ait déclaré qu’elle lui laissait toute liberté à cet égard. Il se bornera quant à présent, à déclarer au sieur DUNES, tailleur et au sieur NARBONNE et à tous autres locataires de la maison de la demoiselle veuve HUGON, située place ST Projet et à mademoiselle veuve LARTIGUE, marchande, locataire de la maison de la demoiselle belle-mère du sieur comparant, sur les fossés des salinières, qu’il s’oppose entre leurs mains sur toutes les sommes qu’ils doivent ou devront ci-après à la demoiselle veuve HUGON pour loyers ou autrement et à ce qu’ils lui en fassent paiement du tout ni de partie ni à d’autres que par préalable le sieur comparant ne soit payé des sommes à lui dues par ladite demoiselle en capitaux et intérêts ou que comme par justice il en ait été ordonné, le sieur comparant dument appelé protestant contre les susnommés s’ils passaient outre de les rendre garants et responsables en leur propre et privé nom de sa créance en principaux et accessoires avec dépends, dommages et intérêt et généralement proteste de tout ce que de droit. En pareil cas dont acte requis et octroyé pour être notifié aux sieurs susnommés ou autres locataires. Fait et passé à Bordeaux en la demeure du dit sieur DUBRUEL le quatorze mai mille sept cent soixante-dix après-midi …. En dessous notifié le lendemain quinze du dit mois de mai du matin aux dits DUNES, NARBONNE et veuve LARTIGUE, locataires de la dite veuve HUGON en leurs demeures et domicile, place ST Projet pour les deux premiers et sur les fossés des salinières pour la demoiselle veuve LARTIGUE, personnellement ou à la servante de chacun d’eux qui a pris copie dudit acte et de la présente notification ».

Question de principe, probablement, mais une nouvelle acquisition de terres exigeait de disposer de liquidités car, le 5 juin de la même année, il achète à Jacques-Siméon de LACHAUSSE les domaines dits : « au Truch » ou à « la chaussée », « aux Saubats » et « aux Fournets », tous situés dans la paroisse de Bouliac.

« par devant les conseillers du Roi, notaires à Bordeaux soussignés, fut présent noble Jacques-Siméon de LACHAUSSE, écuyer, Sr de Saintizard, habitant de cette ville, rue du Casse, paroisse St Michel, lequel a , par ces présentes, vendu avec toute garantie à Sieur Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLIE, professeur en chirurgie, habitant de cette ville, rue et paroisse St Siméon, ici présent et comptant, savoir : en premier lieu un Bourdieu consistant en maison de maitre et des valets, chais, fourniers et autre nature de bâtiments, jardins, vignes, près, bois, jaugas et autres fonds, le tout dans la paroisse de Bouliac, au lieu appelé au truch, autrement de la chaussée, de la contenance de 10 journaux ; en second lieu un autre bourdieu consistant en plusieurs chambres, chais, cuvier et autres bâtiments, vignes, bois taillis, jaugas et pelouses et autres fonds appelés aux fournets autrement au haut du caillau de la grave, de la contenance de 25 journaux ; en troisième lieu un autre bourdieu consistant en maison, vignes, jardin, bois, pelouse, jaugas, appelé aux Saubats autrement au haut de la côte grillée contenant 9 journaux 1/4. En quatrième lieu une pièce de vigne appelée à la plante de l’abbesse contenant 1 1/2 journal et demi ; en cinquième lieu une autre pièce de jaugas et taillis appelé à la gravete près le dit bourdieu des Saubats contenant 2 journaux ; en sixième et dernier lieu, une autre pièce de terre partie en vignes et le restant en pré cy devant en autre nature de fonds appelé au truch de la contenance de 5 journaux, situés dans la paroisse de Bouliac.

Est compris dans la vente, tous les meubles vaisseaux, vinaires, outils oratoires et autres objets mobiliers qui sont dans les dits bourdieux et en dépendent sans faire du tout aucune exception ni réserve, étant ledit bourdieu du truch compris dans le premier article en la censive et seigneurie du sieur MEDOUX, seigneur du fief sous la redevance de 4 deniers d’exporle et pour dix sols de cens et rente chaque année le jour et fête de Toussaint

Les fonds et bourdieux compris dans les deux trois quatre et cinquième articles étant dans la directité de sa majesté à cause de son duché de Guyenne, sous la redevance de six deniers par journal, faisant 18 sols 6 deniers de rente directe et annuelle payable le jour de Noël ; et la pièce de vigne et pré comprise dans le sixième et dernier article relevant des Révérends Pères de l’abbaye de La Sauve au devoir de 4 sols 6 deniers bordelais, valant 2 sols 6 deniers tournois de cens et rente le jour de la Toussaint

Cette vente faite moyennant la somme de 16.000 livres, savoir 2.000 pour tous le mobilier et 14.000 livres pour tout l’immeuble dont 6.500 livres pour tout ce qui est dans le fief du roi, la somme de 6.000 livres pour ce qui est dans le fief de Monsieur MEDOUX et 1.500 livres pour ce qui est dans le fief de l’abbaye de la Sauve.
Le sieur DELACHAUSSE reconnaît avoir présentement reçu du dit sieur DUBRUEL valeurs de 6 livres du cours comptés et réellement délivrés en présence des dits notaires, celle de 3.000 livres dont d’autant quittance à valoir sur le prix de l’immeuble de convention entre les parties. A l’égard des 13.000 livres de surplus dudit prix, le dit sieur DUBRUEL promet et s’oblige de les payer au dit sieur DELACHAUSSE en cette ville ou à son ordre en pièces d’or ou d’argent et non autrement en six ans de ce jour avec faculté d’anticiper le dit délai et de se libérer en plusieurs paiements pourvu que le moindre soit de 3.000 livres.
 
Jusqu’au paiement de la dite somme de 13.000 livres le sieur DUBRUEL sera tenu d’en payer l’intérêt au sieur DELACHAUSSE à raison de deux vingt à la fin de chaque année à compter de ce jour qu’il fera à proportion des paiements qui seront faits sur le capital 

 Le bourdieux acquis par le dit sieur DUBRUEL consistants savoir

Le bourdieu du truch ou de la chausse en maison du maître, cour au-devant joignant le chemin, chambre du paysan, appentis au devant, autre appentis neuf, jardin, jeune plante en vigne à côté et autres vignes et prés, le tout composant le dit bourdieu du Truch.

Plus le bourdieu appelé Fournets consiste en chais, cuvier, chambre basse, grenier, plaines et bois taillis avec un jardin. Tous les fonds des dits deux bourdieux en un tenant 

Plus le bourdieu de Saubat au haut de la côte grillée consistant en chambre de paysan et cuvier, jardin, pelouse vignes et bois en un tenant ;

Plus le dit bourdieu des Saubats consiste en une pièce de vigne appelée la plante de labesse  plus en une costière de bois dépendante du dit saubat, dans le bout au levant de laquelle costière est un petit chemin de sortie appartenant en entier au dit sieur DUBRUEL en seul et qui va aboutir à un autre petit chemin appartenant dans son milieu au sieur PICHARD dans laquelle partie le sieur DUBRUEL a droit de passage et la propriété dans le bout du dit dernier chemin qui a son issue au chemin de la gasquerie à Bouliac ainsi que les parties ont déclaré et reconnu.

Plus une autre pièce de pelouse, jaugas et bois taillis dépendante de Saubat appelée à la Gravete qui était autrefois partie en vignes.

le paragraphe qui suit est intéressant car relatant les us et coutumes de prise de possession par un nouveau propriétaire foncier
De ces trois bourdieux, le sieur DUBRUEL en la présence du sieur DELACHAUSSE a pris la possession réelle et personnelle par la sortie et rentrée dans tous les bâtiments où il a fermé et ouvert les portes et fenêtres, fait allumer et éteindre du feu dans chaque lieu et ensuite sommes allés sur tous les fonds de toute espèce des bourdieux, soit jardins, vignes, bois, prés, jaugas, pelouses et autres où le dit sieur DUBRUEL a jeté en l’air des poignées de terre, arraché de l’herbe, branche d’arbre et ceps de vigne, promené, parcouru tout en long qu’en travers, séjourné et observé divers autres actes en pareil cas accoutumés, sans qu’il ait été formé aucun trouble de personnes quoique fait au vu et su de tous ceux qui ont voulu le voir et savoir... Fait et passé dans la dite maison principale du truch un peu après midy le dix juin et voulu les dits sieurs DUBRUEL et DELACHAUSSE signé en présence de Jean RETOURET et Jean BROUSTON, vignerons dans les bourdieux du truch et saubat, habitants de la paroisse de Bouliac, témoins requis qui ont déclaré ne savoir signer de ce interpellés.

Voici donc notre ancêtre propriètaire de quelques 52 journaux de 50 ares chacun soit d’environ 2 ½ hectares de bonnes terres dont certaines plantées de ces vignes qui donnent aujourd’hui des premières côtes de Bordeaux.
                                                                
Vers cette époque, le jeune Pierre GUERIN, chirurgien originaire de Couzon au Mont d’Or, membre du collège royal de chirurgie et chirurgien interne du grand Hôtel-Dieu de Lyon se voit refuser le poste de chirurgien-major de cet établissement et décide de gagner Bordeaux avec le dessein de s’embarquer pour les îles.
La suite est racontée par M. GINTRAC dans l’éloge funèbre qu’il fit de Pierre GUERIN devant ses pairs de la Société des Lettres et Arts de Bordeaux : «le titre de chirurgien de bord ne s’acquérait qu’en vertu d’un examen. M. DUBRUEL, chirurgien de l’amirauté, s’aperçut bientôt qu’il n’interrogeait point un candidat ordinaire . Frappé de l’instruction solide et vaste que M. GUERIN venait de déployer devant lui, joignant à beaucoup de savoir et de pénétration une bienveillance naturelle, une franche cordialité, cet excellent homme s’empressa de détourner son jeune ami du projet qu’il avait formé, lui fit entrevoir un avenir heureux s’il se fixait dans cette ville, lui promit de l’appuyer de toute son influence et même lui permit d’aspirer à la main de sa fille. Déterminé par de si puissants motifs, consolé par de si brillantes espérances, M. GUERIN renonça pour jamais à chercher une fortune incertaine au-delà des mers. Bordeaux devint sa patrie adoptive. »


GUERIN poursuivit son instruction à Montpellier, Paris et Londres où il passa une année au côté de William BROMFIELD, l’un des plus grands chirurgiens de son temps, puis revint à Bordeaux où il épousa Mademoiselle DUBRUEL le 17 septembre 1772
« par devant les conseillers du roi, notaires à Bordeaux soussignés, furent présents sieur Pierre GUERIN, chirurgien gradué, habitant de cette ville, place et paroisse St Projet, fils légitime de sieur François GUERIN,maître chirurgien de la paroisse de Couzon au Mont d’Or, près la ville de Lyon et de feue demoiselle Marguerite SIMONIN, procédant comme majeur et maître de ses droits de l’avis et autorité du dit sieur son père, représenté par le sieur Jean LAGARDE, maître et marchand fourbisseur à Bordeaux, capitaine des troupes de la ville, domicile rue des argentiers, paroisse St Pierre, fondé de la procuration du dit sieur GUERIN passée devant maître CHEVRILLON et son confrère, notaires à Lyon, le premier juillet dernier et dont une expédition légalisée et scellée est demeurée attachée à la présente après avoir été signée pour ne varier du dit sieur LAGARDE et qu’il a été observé qu’il y a cinq mots rayés à la dite procuration ; agissant aussi le dit sieur GUERIN fils de l’avis de ses autres parents et amis qui signeront ci-après d’une part

Et demoiselle Pétronille DUBRUEL DEBROGLIO, fille légitime du sieur Pierre Antoine DUBRUEL DEBROGLIO, professeur royal en chirurgie et de demoiselle Anne Toinette HUGON, procédant de l’autorité et consentement des dits sieur et demoiselle ses père et mère ici présents, avec lesquels elle habite en cette ville rue et paroisse St Siméon et d’autres ses parents et amis qui signeront aussi ci-après d’autre part.

Entre lesquels sieur Pierre GUERIN et demoiselle DUBRUEL a été fait le traité de mariage de la manière qui suit :

Ont promis de se prendre pour mari et femme par foi et loi de mariage et d’en faire la solennité en face de la Sainte Eglise catholique, apostolique, romaine à la première réquisition l’un de l’autre ou de leurs parents à peine de tous dépens, dommages et intérêts. En faveur et considération duquel mariage au cas qu’il s’accomplisse, les sieur et demoiselle DUBRUEL constituent en dot et par moitié à la dite demoiselle DUBRUEL, leur fille, la somme de 12.000 mille livres, à compte de laquelle le dit sieur futur époux reconnaît avoir reçu, avant ces présentes des sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère, celle de six mille livres dont 4.000 en argent compté et espèces du cours et 2.000 en meubles neufs et effets mobiliers de valeur, dont autant quittance et reconnaissance à la dite demoiselle future épouse de la somme de six mille livres sur tous les biens présents et à venir du dit sieur futur époux, comme il sera tenu de faire des autres droits qu’il recevra de la dite demoiselle future épouse

Promettant les sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère, de payer aux dits futurs époux acompte du restant, en cette ville, en espèces d’or ou d’argent la somme de 4.000 mille livres, lorsqu’ils recevront les droits de la demoiselle DUBRUEL mère du chef des sieur et demoiselle ses pères et mères, ou lorsque le sieur DUBRUEL, vendra son bien de Fargues ou celui de Bouliac en entier, sans intérêt jusqu’alors, sans néanmoins que la vente qu’il est à même de faire du petit Bourdieu de Saubat, qui fait partie du dit Bourdieu de Bouliac soit sensé remplir la dite condition et puisse rendre exigible les dites 4.000 mille livres en tout ni en partie.

Etant convenu par exprès que si le dit sieur DUBRUEL décédait, avant d’avoir reçu tous les dits droits de la dame son épouse ou avant la vente de l’un des dits biens en entier, en ce cas la demoiselle DUBRUEL mère, ni la succession héritiers de son mari ne seront tenus de payer les dites 4.000 livres, ni le futur époux les exiger ;qu’après sa mort, à la charge seulement aux dits cas de payer au dit sieur futur époux l’intérêt de la moitié de la dite somme, lequel intérêt ne commencera à courir qu’après que la dite demoiselle DUBRUEL mère aura recueilli, elle-même, ses entiers droits de ses père et mère : le paiement de laquelle somme de 4.000 livres ne sera fait aux époques prévues qu’à la charge par le sieur futur époux de faire un emploi qui puisse répondre de la dot ci-dessus constituée.

Et quant aux 2.000 livres restantes de la dite dot, les sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère, s’obligent à nourrir et loger à leur table et compagnie les futurs époux pendant deux ans et demi du jour des noces pour s’acquitter par eux de la dite somme et en cas de séparation avant l’échéance du dit délai, du fait de l’une ou l’autre des parties, les sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère, s’obligent de payer, au dit cas, ce qui restera des 2.000 livres dans dix huit mois de la date de la retraite, si le dit restant n’excède pas la somme de 1.000 livres et dans le cas contraire, la somme qui restera due ne pourra être exigée que dans deux ans de la même époque et sans intérêts.

La dot de la demoiselle future épouse et autres droits qui pourront lui échoir lui seront propres.

Seront les futurs époux associés pour moitié dans tous les acquêts meubles ou immeubles qu’ils feront pendant leur mariage, qui appartiendront qui en seront procréés sous la réserve d’en avantager, chacun de sa moitié, un ou plusieurs des dits enfants ou, à leur défaut, d’en disposer en faveur de l’un de l’autre futurs époux ou de qui bon leur semblera. L’usufruit du total des dits acquêts appartiendra au survivant, enfants ou non pendant sa vie.

Le survivant gagnera sur les biens du premier décédé la somme de 600 livres dont ils se font donation l’un l’autre pour agencement, renonçant à cet égard à la coutume.

Toutes les bagues et joyaux qui seront donnés à la demoiselle future épouse par le dit sieur futur époux, seront propres à la dite demoiselle pour en disposer à sa volonté.

Et pour tenir lieu à la demoiselle future épouse de plus amples bijoux que le sieur futur époux voulait lui donner, il lui reconnaît sur tous ses biens présents et à venir la somme de 1.000, dont elle pourra disposer comme elle avisera. Laquelle reconnaissance sera cependant sans effet si la dite demoiselle future épouse pré décède sans enfant le sieur futur époux.

Et comme la demoiselle future épouse est fille de maître chirurgien et, qu’à raison de cette qualité, si le sieur futur époux, après le mariage, veut se faire recevoir chirurgien juré de cette ville, il profitera d’une diminution de la somme de 1.000 sur les frais et droits de sa réception, il déclare reconnaître et assigner à la dite demoiselle future épouse, pareille somme de 1.000 sur ses dits biens, présents et à venir, laquelle reconnaissance sera aussi sans effet si le dit sieur futur époux ne se faisait pas recevoir maître chirurgien juré de cette ville ou qu’il vint à payer et rembourser la dite somme aux sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère ou de quelque autre manière que ce puisse être.

Et en cas de prédécès du sieur futur époux, la demoiselle future épouse jouira et fera les fruits siens de tous les biens qui seront par lui délaissés, jusqu’à ce qu’elle soit entièrement remboursée en argent ou fonds, à son choix, de sa dot, agencements,reconnaissances et autres droits, créances, reprises et conventions matrimoniales, sans que la dite jouissance puisse lui être imputée sur le sort principal de ses droits, ni autrement ; sur laquelle jouissance autant que de besoin, le dit sieur futur époux lui fait donation, renonçant à cet égard à la coutume et à la charge de nourrir et loger les enfants du mariage, s’il y en a et supportant les charges des biens.

Car ainsi le tout a été convenu entre les parties, promettant, s’obligeant, chacune à son égard.

Fait et passé à Bordeaux dans la demeure des dits sieur et demoiselle DUBRUEL, père et mère et de la demoiselle future épouse, le 17 septembre 1772.

Assistaient à cette cérémonie et ont signé l’acte, de grands noms de l'armement, du commerce maritime, de la traite négrière, du vin, de la magistrature et de l’aristocratie bordelaise et parfois de tout cela à la fois, qui en disent long sur la notoriété de Pierre-Antoine : TANAIS, DUPERIER, VERTHAMON du PERIER, DUPERIER de CURSOL du TAILLANT, CURSOL de TALENCE, veuve de ROLLAND, de LAROZE, CHAPERON, TENNAC de CHAPERON, MESLON conseiller clerc, GRAMAIGNE, DELAU PIGEON, PERREYRA de CAJUS, de GASCQ de LAMENAUDIE, MARCHANDON, LACROIX de CHAIGNE, MENOIRE de KATER, de KATER,


GUERIN sera membre de l’Académie de Bordeaux dès 1773, du Collège de chirurgie de la ville et chirurgien en chef de l’hôpital St André. Membre fondateur de la Société de Médecine de Bordeaux, qu’il présidera à trois reprises, il sera, également, membre correspondant de l’Académie de Médecine de Montpellier. Il est célèbre pour son traité sur les maladies des yeux, dans lequel il proposait un instrument nouveau qui fixait l’œil tout à la fois et opérait la section de la cornée ( 1769 ) et pour avoir réalisé la première cystotomie en deux pour lithiase vésicale.

Son renom était tel qu’à son décès, en 1827, Bordeaux donna son nom à une de ses rues.

Il avait eu du nez Pierre-Antoine ... il est vrai que chez les DUBRUEL, cet appendice est souvent de taille ...!

 
En 1773, notre ancêtre est élu, pour deux ans, vice directeur de la Société académique de chirurgie de Bordeaux.

Le 15 juillet de la même année, Jean-François-Hilaire lui écrit : « je vous félicite, mon cher cousin de ce que vous êtes grand-père par l’endroit qui doit vous être le plus flatteur de l’espèce du sexe » et aborde aussi, dans cette lettre transmise par Pierre-Antoine le contemporain, deux ou trois autres points qui nous en disent un peu plus sur la famille.

Madame de GIRONDE, une proche des deux hommes, habitant Tournon, y fait demander la poursuite de son abonnement ( 18 livres par an ) au « Journal Historique et Politique de Genève » au près des frères LABOTTIERE, célèbres imprimeurs et libraires bordelais. Ce journal, censé venir de Genève et donc réputé échapper à la censure, était très en vogue chez ceux qui partageaient les idées des Encyclopédistes. Devant son succès et pour éviter la concurrence, son propriétaire, PANECOUCKE, qui avait tout compris, avait également lancé le « Journal Politique et de Littérature » lequel, censé venir de Bruxelles, était de tendance très conservatrice…

Chez les DUBRUEL, la tendance est, en effet, aux idées nouvelles ; c’est ainsi que dans un courrier, également daté de 1773, Jean-François-Hilaire s’inquiéte au près de Pierre-Antoine des raisons qui ont amené l’ordre à radier du barreau bordelais Nicolas de LISLEFERME, un avocat et jurisconsulte célèbre et richissime - son hôtel particulier était si grand qu’il abrite aujourd’hui le musée d’Histoire Naturelle - notoirement membre des « cercles éclairés » et de la franc-maçonnerie de la ville. L’affaire fit tant de bruit dans le Landerneau local, que l’intéressé fut bien vite réintégré.. Ce ne devait pas être bien grave.
les DUBRUEL de Tournon étant tous francs-maçons et Jean-François Hilaire ayant pris sous son aile Pierre-Antoine, on peut, sans être grand clerc, supposer que ce dernier l'était également, tout comme l'était la quasi totalité des signataires du contrat de mariage de Pétronille et du sieur GUERIN.

L'épisode qui suit vient conforter la chose.
 
Jean-François-Hilaire ajoute en post-scriptum: « je vous félicite du reste de l’honneur de la connaissance et du traitement heureux que vous avez fait de Madame la comtesse DEBROGLIO »

En 1773, le seul à porter le titre de comte de BROGLIO est Charles François comte de BROGLIE et Marquis de Ruffec ( en Charente ), chef du « Secret du Roi » et donc de la diplomatie secrète. Régulièrement éloigné de la cour, il vit sur ses terres du Sud-Ouest et se rend, parfois, pour ses affaires, à Bordeaux, ville cosmopolite tournée vers les Amériques,. C’est lui qui poussera LA FAYETTE à rejoindre les Insurgents en 1777
Tous deux sont "Frères", le premier dans la loge des "vrais amis" et le second dans celle de "la candeur"...

Ce post scriptum, peut laisser supposer que l'épouse du Comte ait eu nécessité d’une assistance médicale à Bordeaux et que c’est vers Pierre-Antoine qu'elle s'est tournée, ce qui en dit long sur sa notoriété et/ou sur les liens unissant les deux hommes.
 
Le 30 août de cette même année 1773, Pierre-Antoine poursuit le remboursement anticipé de ses terres de Bouliac. Le moins que l'on puisse dire est que le sieur DELACHAUSSE ne tenait pas à arrondir

« et le trente août mille sept cent soixante-treize après midy est comparu devant le notaire à Bordeaux soussigné les sieurs  DELACHAUSSE, écuyer, dénommé et qualifié cy devant, lequel reconnaît avoir présentement reçu en écus de six livres et monnaie du cours, comptés, nombrés et réellement délivrés à la vue du dit notaire du dit sieur DUBRUEL de BROGLIO à ce présent dénommé au dit contrat la somme de 5.200 livres à savoir 5.000 livres de capital pour moitié de celle de 10.000 livres qui restaient dues du prix de la vente du bourdieu énoncé au dit contrat, le surplus ayant été payé par icelui et la quittance ensuite et 200 faisant avec 168 livres payées par le dit sieur DUBRUEL au dit sieur DELACHAUSSE à valoir sur les intérêts de convention expresse passée entre eux suivant la reconnaissance du dit sieur DELACHAUSSE du quinze octobre dernier que le dit sieur DUBRUEL lui a présentement remise et 50 livres 14 sols 5 deniers retenus par le dit sieur DUBRUEL pour les impositions royales, celle de 458 livres 6 sols 8 deniers pour onze mois d’intérêt qui ont couru depuis le premier octobre dernier jusqu’à ce jour de laquelle première somme de5.239 livres 6 sols 3 deniers le dit sieur DELACHAUSSE quitte et décharge le dit sieur DUBRUEL de la somme capitale de  5.000 livres et de douze mois d’intérêt sous la réserve que fait le dit sieur DELACHAUSSE des 5.000 livres qui lui restent dues en capital pour être payées dans le temps et aux conditions portées dans le dit contrat, se réservant aussi les intérêts qui courent à compter de ce jour avec les actions, hypothèques, privilèges qui résultent du dit contrat, promettant, obligeant , renonçant, fait à Bordeaux en l’étude le dit jour et ont signé.


L’almanach historique de la province de Guienne de 1776, mentionne toujours Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLIO comme chirurgien de l’amirauté et comme professeur et démonstrateur devant traiter de l’ostéologie et des maladies des os, pendant les mois de novembre et décembre. Son cours succédait à celui du sieur LAFOURCADE qui traitait des grands principes, des plaies et des ulcères, LARRIEU intervenait ensuite avec son cours d’anatomie, puis DUPUY pour les opérations et les accouchements et enfin FELLONEAU pour les médicaments.

Pendant ces deux mois il «entrait les lundi, mardi, jeudi et vendredi de chaque semaine, excepté les jours fériés. »

Le 1er juin 1776, fait l’acquisition, en l’étude de Maîtres CHEYRON et FAUGAS, de la maison de la rue Porte Dijeaux, son futur et dernier domicile. La maison semble, qui semble être de taille, mais en ruine, sera achetée 14.000 livres, ce qui peut paraître cher, mais n’oublions pas que le quartier, était en pleine rénovation … le jeu en valait la chandelle. De nos jours cette maison a disparu, faisant place aux galeries Lafayette, au moins en partie.

Par devant les conseillers du Roy, notaires à Bordeaux soussignés, fut présent Messire >Pierre de ROLAND, chevalier, habitant ordinairement de la ville de Montauban étant de présent en celle-ci logé chez M. SABLAT, chanoine de St André, rue Bauberat, paroisse St Christophe.

Procédant tant en son propre et privé nom que comme procureur constitué de Messire Jean-Baptiste de ROLAND, écuyer, son frère aîné, habitant de ladite ville de Montauban suivant la procuration générale du 24 mai 1774, retenue par MARTIN, notaire en ladite ville en présence de témoins, dument contrôlée, renouvelée et confirmée par une autre procuration donnée par les dits sieurs de ROLAND frères de vendre la maison ci-après le nom en blanc qui a été barré en date du 25 avril dernier devant DELMART, notaire royal de ladite ville aussi dument contrôlée dont l’original et l’expédition en parchemin de la première l’une et l’autre sont demeurées annexées à ces présentes après avoir été signées ne varietur dudit sieur chevalier de ROLAND.

Lequel a par ces présentes, vendu sous sa garantie et du dit sieur son frère aîné solidairement, l’un pour l’autre, un seul pour le tout, sans division ni discussion, renonçant au bénéfice et exécution du droit qu’il a dit savoir ; à sieur Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLI, professeur en chirurgie à Bordeaux, y demeurant place et paroisse St Projet, à ce présent et acceptant, une maison située en cette ville rue Porte Dijeaux, occupée par les sieurs SAVOURION et autres, consistant en une boutique d’entrée distribuée en plusieurs pièces par des cloisons appartenant au dit sieur SAVOURION en remettant les lieux comme ils étaient sans les dégrader, chambres et bains au derrière, chai au-devant dont la porte

Est sur la rue des alouettes, cave prudente sur le devant, cour au rez de chaussée, plusieurs chambres au premier étage, autres chambres au second étage, deux greniers, communs et dépendances, le tout en très mauvais état.

Confrontant du nord à la dite rue Porte Dijeaux, du midi à la dite rue des alouettes, du levant à la maison des sieurs ETIENNE et MINANDRONE entre deux communs, du couchant confronte à la maison du sieur BROUILLARD, mur mitoyen entre deux.

 Etant ladite maison vendue en la censive et seigneurie du seigneur de qui elle relève et qui sont M. le Doyen et chanoines du chapitre de l’église collégiale St Seurin de cette ville et vers eux chargée de tels cens et rentes qu’elle peut devoir, que les parties n’ont su déclarer de ce en quoi suivant l’ordonnance, franche et quitte ladite maison des arrérages et autres droits seigneuriaux du passé jusqu’à présent, à la charge par l’acquéreur de payer ladite rente à l’avenir à compter de ce jour .

Consent monsieur le chevalier de ROLAND et dits noms que ledit sieur DUBRUEL jouisse et dispose de ladite maison et dépendances en propriété et usufruit à compter de ce jour.

A cet effet, il lui transpose tous ses droits, raisons et actions et dudit sieur son frère sur ladite maison, voulant qu’il en soit saisi et vêtu et qu’il en prenne la possession réelle quand il voudra et que par le même acte ou séparément, le dit sieur DUBRUEL fasse été et procès-verbal de la situation de dégradation de ladite maison sans avoir besoin d’observer aucune formalité de justice, ni de la présence dudit sieur vendeur qui confesse et reconnaît que ladite maison a besoin de promptes et pressantes réparations pour la rendre habitable et en éviter une plus grande destruction et, en conséquence, il est par exprès convenu qu’il sera possible et loisible au sieur DUBRUEL de faire faire à ladite maison toutes les réparations nécessaires qu’elle aura besoin pour pouvoir être habitée et éviter le progrès de la dégradation sans avoir besoin de faire faire aucun verbal judiciaire dont le dit sieur chevalier de ROLAND dispense le sieur DUBRUEL ni d’aucune autre précaution ou formalité.

Cette vente faite aux conditions susdites, moyennant la somme de 14.600 livres, acompte de laquelle somme Monsieur le chevalier de ROLAND reconnaît avoir présentement reçu dudit sieur DUBRUEL en écus à six livres, comptées, nombrées et réellement délivrées à la vue desdits notaires, celle de 4.600 livres dont d’autant quittance de la part de Monsieur le chevalier de ROLAND tant pour lui que pour Monsieur son frère. A l’égard de la somme de 10.000 livres restant du prix, ledit sieur DUBRUEL promet et s’oblige de la payer à Monsieur le chevalier de ROLAND ou à son ordre, soit en cette ville en espèces d’or ou d’argent après l’obtention des lettres de ratification sur le présent contrat, scellées, sans opposition ni autres empêchements, lesquelles lettres de ratification, le dit sieur DUBRUEL sera tenu d’obtenir dans deux mois et demi, à moins qu’elles ne soient retardées du fait des dits sieurs de ROLAND vendeurs, jusqu’au paiement duquel restant de prix, ledit sieur DUBRUEL sera tenu de payer l’intérêt à raison du denier vingt à compter de ce jour.

Et jusqu’au paiement du restant de prix en capital et intérêt de la manière susdite, monsieur le chevalier de ROLAND réserve son privilège spécial et audit sieur son frère sur ladite maison vendue et leur hypothèque générale sur tous les autres biens présents et à venir dudit sieur DUBRUEL sans qu’une obligation déroge à l’autre.

Ce jour, l’exécution des présentes, le sieur chevalier ROLLAND tant pour lui que le sieur son frère a élu domicile pour tous les deux en cette ville chez le sieur SABLAT logé rue Baubedat auquel lieu il consent la validité de tous actes. Promettant, obligeant chaque partie à son égard ledit sieur chevalier de ROLLAND solidairement comme il est dit. Fait et passé à Bordeaux en l’étude de Faugas le 1er juin 1766 après-midi et signé.

Pierre Antoine recevra quittance de son entier paiement en septembre de la même année.

Les vins de Palus, élevés sur le terroir de Bouliac, se vendaient de 150 à 200 livres le tonneau et ceux de Fargues pouvaient se négocier autour de 300 livres. Les deux communes étant des paroisses de la « sénéchaussée privilégiée », les bourgeois de Bordeaux qui y possédent des vignes, jouissent du double droit de pouvoir faire entrer leur vin en ville sans avoir à acquitter de taxe et de le commercialiser toute l’année durant, les autres crus devant disparaître des entrepôts bordelais le 8 septembre ou être brûlés. Seuls ces vins pouvaient être conditionnés dans les fameuses barriques bordelaises, facilement identifiables et donc gages de garantie de la qualité de leur contenu. Enfin, des emplacements de stockage privilégiés leur sont réservés depuis le 27 janvier 1741, date à laquelle les jurats de la ville avaient décrété que :  « les propriétaires, locataires ou fermiers des chays ou celliers situés en paludate ou aux chartrons au-delà de la rue St Esprit, ne pourront recevoir sous quelque prétexte que ce puisse être d’autres vins que ceux jouissant de la jauge bordelaise. »

C’est donc très logiquement que Pierre Antoine se mit en quête de l’un de ces endroits privilégiés pour ses vins de Fargues et de Bouliac. Il en trouvera un en bordure de Garonne, justement au fameux lieu dit « la Paludate » et l’achète, le 1er mars 1780, au seigneur François de BELCIER de CRAIN, secrétaire de Louis XVI. L’affaire est conclue solidairement avec son gendre GUERIN pour la somme de 9.000 livres.

Par-devant les conseillers du Roi, notaires à Bordeaux soussignés,

Fut présent sieur Jacques MONRENY, négociant de cette ville, y demeurant rue Métivier, paroisse St Maixent, au nom et comme procureur de messire François de BELCIER, seigneur de Belcier, de Crain et autres lieux, demeurant en son château appelé de Belcier, paroisse de Salles, fondé de sa procuration générale et spéciale à l’effet de la vente passée ci-après devant  BATTUTMARIN, notaire à Gardagan, vicomté de Castillon en Guienne, en présence de témoins le 31 janvier 1777 dont expédition, signée et paraphée ne varietur par le dit sieur MONRENY et les notaires soussignés est demeurée annexée à la minute d’un contrat de vente consenti par le dit sieur MONRENY , au dit nom, en faveur de Richard LESCLIDES, tonnelier, passé devant le dit notaire au rapport de CHEYRON, qui en a la minute, le 30 avril 1778. Contrôlé et insinué le premier mai suivant, laquelle procuration sera transmise ensuite dans les expéditions qui seront faites des présentes.

Lequel sieur MONRENY a, par les dites présentes, vendu et promis au dit nom du dit seigneur de BELCIER, garantir de tous troubles, dettes, hypothèques, dons, douaires, éviction, substitutions et autres empêchements quelconque,

A Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLIO et Pierre GUERIN, beau-père et gendre, maîtres en chirurgie et professeurs royaux aux Ecoles de chirurgie de cette ville, demeurant ensemble dans une même maison place et paroisse St Projet, à ce présents et acceptants, acquérants pour eux, par moitié et en commun, leurs successeurs et ayant cause,

C’est à savoir

Un emplacement ou terrain, vide, situé au lieu de Paludate, paroisse Ste Croix de Bordeaux, ayant sa façade sur la rivière, contenant dans sa totalité 30 pieds 3 pouces de largeur ou façade sur le devant, 21 pieds 9 pouces sur le derrière, ce qui fait une largeur moyenne dans le milieu de 26 pieds, le tout sur 241 pieds de longueur ou profondeur dans les parties du midi et nord, produisant ensemble 174 toises carrées et 1/8ème de toise. Ensemble est vendue la place ou quai aboutissant à la rivière qui est au devant du dit emplacement et de la même largeur, en étant séparé par le grand chemin ou rue de Paludate, sans cependant entendu par le dit sieur MONRENY , au dit nom, que le seigneur de Belette soit tenu, à cet égard à aucune garantie envers les dits sieurs acquéreurs qui y ont expressément renoncé, comme prenant sur eux et à leur charge les propriété et jouissance de la dite place ou quai.

Pour par les dits sieurs DUBRUEL et GUERIN, acquéreurs par moitié et en commun, jouir, faire et disposer des dits emplacement et lieux vendus, circonstances et dépendances sans exception en pleine propriété, en usufruit comme de choses leur appartenant à juste titre et à compter de ce jour,

Cette vente ainsi faite à la charge par les dits acquéreurs d’acquitter et d’apporter, pour l’avenir seulement, outre les lods et ventes résultant des présentes, la quotité que doit supporter le dit terrain vendu des modiques cens et rentes foncières et directes que les parties ont dit ne savoir précisément dont tous les biens et possessions au lieu de Paludate venant du dit seigneur prieur du Mas, sont tenus envers l’abbaye Ste Croix de Bordeaux de laquelle ils relèvent en censive seigneurie, le dit sieur MONRENY , au dit nom, quittant et affranchissant aux dits sieurs acquéreurs le dit terrain à eux vendu de la dite quotité le concernant, des arrérages, cens, droits et devoirs seigneuriaux et autres redevances du passé jusqu’à présent.

En outre, moyennant la somme de 9.573 livres, 1 sou, 3 deniers, ce qui est à raison de 55 livres la toise carrée de la contenance du dit emplacement vendu sur et en déduction de laquelle somme les dits sieurs DUBRUEL et GUERIN, acquéreurs de leur deniers propres et par moitié, ont présentement et réellement payé et délivré en écus à six livres pièce et monnaie du courant, celle de 2.573 livres, 1 sou, 3 deniers, au sieur MONRENY qui l’a prise, comptée et vers lui retirée à la vue du notaire soussigné, dont au nom de la procuration du le dit seigneur de BELCIER. Il tient et promet en faire tenir et déchargés les dits sieurs acquéreurs.


Quant aux 7.000 livres restantes parfaisant le prix de vente, les dits sieurs DUBRUEL et GUERIN, acquéreurs, promettent et s’obligent solidairement entre eux, l’un pour l’autre ou seul pour eux deux, renonçant aux bénéfices d’ordre, de division, discussion et exceptions de droit expliqués et entendus, de payer au seigneur de BELCIER ou à son mandement certain en cette ville, dans la maison où demeure le dit sieur MONRENY , à lui-même ou autres chargés de pouvoirs expresses, dans huit années prochaines à compter de ce jour avec cependant l’intérêt de ce même jour que les dits acquéreurs acquitteront savoir l’intérêt qui courra à compter de ce jour jusqu’au premier janvier prochain, ce jourd’hui et ensuite l’intérêt qui courra après ce terme se paiera chaque année au premier janvier, pendant que le capital sera du. Lesquels intérêts ci-dessus établis à raison de 5% annuellement seront acquittés, francs, quittes et exempts des deux vingtièmes, des quatre pour livre, du vingtième actuellement établi et de toutes charges et impositions royales,
Jusqu’au paiement effectif de la dite somme de 7.000 livres restant des dits prix de vente et des intérêts qui en courront, le dit sieur MONRENY, au dit nom du seigneur de BELCIER, lui réserve tous ses droits actions, privilèges et hypothèques sur le dit terrain vendu qui en reste chargé et affecté.

Fait et passé à Bordeaux, en l’étude de CHEYRON, l’un des notaires soussignés, le 1er mars 1780 de relevée et ont chacune des parties signer.


L'addendum reprend les rituels de prise de possession de la propriété.

L'instant d’après la clôture et signature du contrat des autres parts, à la réquisition des sieurs Pierre Antoine DUBRUEL de BROGLIO et Pierre GUERIN, beau-père et gendre, acquéreurs par moitié et indivis, dénommés et qualifiés au dit contrat,


Les dits notaires de Bordeaux, soussignés, se sont transportés au dit lieu de la Paludate et sur le terrain vendu et acquis suivant le dit contrat, pour en mettre les dits sieurs DUBRUEL et GUERIN en possession, où étant parvenus, ils en ont chacun dans le même moment pris la possession réelle, actuelle et personnelle, par leurs libres entrées et sorties. Chacun d’eux y a pris, arraché et jeté en l’air une poignée de terre, resté, promené et séjourné autant de temps que bon lui a semblé, en y faisant réciproquement divers autres actes et cérémonies possessoires aux vue et su de tous ceux qui l’ont voulu voir et savoir, sans aucun trouble, opposition ou empêchement de personne quelconque, dont acte requis, pour valoir aux sieurs DUBRUEL et GUERIN dans leur acquisition ainsi que de raison, octroyé.


Fait au dit lieu de la Paludate sur le dit emplacement et ont signé


Si l’on se résume Pierre Antoine et son gendre ont déboursé 2.600 livres arrondies pour le terrain et 2.000 livres pour engager des travaux, en tout 4.600 livres. Ils restent devoir un capital de 7.000 livres à payer dans les huit ans, au taux de 5%, soit, au pire 350 livres par an pendant huit ans.
Tous deux vont édifier, sur ce terrain, un chai de 174 toises carrées ( 661m2 ), qu’ils n’utiliseront pas ou très peu pour leur usage personnel car, deux ans plus tard, le 27 juillet 1782, en l'étude du même CHEYRON, ils revendront le tout, à un certain PRINCETEAU, pour la bagatelle de 36.000 livres. Ce dernier faisait son affaire des 7.000 livres toujours dues à BELCIER et s’engageait à payer les autres 29.000 livres sur six ans au même taux de 5%.
Faisons rapidement le bilan de cette opération .....le team DUBRUEL/GUERIN  a dépensé 4.600 livres auxquelles s’ajoutent les intérêts sur deux ans de 700 livres = 5.300 livres et a reçu cash une première annuité d’intérêt de 29.000 x 5% = 1.450 livres, plus un Bénéfice net de 29.000 livres pouvant rapporter, s’il n’était pas remboursé avant la sixième année, une rente annuelle de 1.450.

Si ce n’est pas de l’investissement spéculatif, ceci y ressemble fort. Probablement nos duettistes avaient-ils décidé de profiter de la flambée des prix engendrée par le« privilège du vin » pour remplir leurs bourses..  

Le retour sur investissement du pauvre Monsieur PRINCETEAU fut de courte durée car le privilège du vin disparut dans la tourmente de la nuit du 4 août 1789, quant à François de BELCIER la Révolution l’envoya à l’échafaud le 4 messidor an II.

La même année 1782, Pierre-Antoine agrandit sa propriété de Bouliac en réglant un problème de servitude

Par devant les conseillers du roi, notaires à Bordeaux soussignés

Fut présent le sieur Bernard MEDOUX, bourgeois et négociant de cette ville demeurant dans sa maison rue du Casse, paroisse ST Michel

Lequel a par ces présentes vendu avec toute garantie au sieur Pierre Antoine DUBRUEL, professeur royal de chirurgie, habitant de cette ville place et paroisse St Projet à ce présent et acceptant ; savoir est une pièce de terre labourable appelée le pujau de taujan, paroisse de Bouliac, partie ensemencée de la contenance de cinq journaux environ plus ou moins s’il y en a et de quelque contenance qu’elle puisse être sans exception.

Appartenant au sieur MEDOUX comme faisant une dépendance de son bien de Bouliac, consent que le sieur DUBRUEL jouisse et dispose de la pièce de fonds en propriété et usufruit à compter de ce jour, lui transportant tous ses droits, raisons et actions relatifs pour qu’il en prenne la possession réelle quand il voudra à la charge de payer la rente seigneuriale à Monsieur le Baron de LA SALLE CAILLAU de qui elle relève en censive et directivité, sous la redevance d’un sol par journal, sans autre charge ni redevance quelconque, franche et quitte des arrèrages et autres droits seigneuriaux du passé jusqu’à présent.

Cette vente faite moyennant la somme de 2.020 livres que le sieur MEDOUX reconnaît avoir reçu présentement du sieur DUBRUEL en écus de 6 livres et monnaie pour appoint, le tout du cours, compté, nombré et réellement délivré à la vue des dits notaires, dont quittance.et au moyen des présentes les parties veulent et consentent que les prétentions respectives des dites parties tant en raison de l’empiètement que le sieur MEDOUX prétendait que le bois du sieur DUBRUEL avait fait sur la terre du dit MEDOUX, ci-dessus vendue, qu’à raison du prétendu droit de passage que le dit sieur MEDOUX réclamait sur le chemin qui longe le bois et l’enclos du dit sieur DUBRUEL, demeurent sans aucun effet, renonçant les parties à pouvoir rien prétendre l’une contre l’autre ce concernant, notamment le sieur MEDOUX de pouvoir passer par lui et les siens dans le chemin pour quelque cause que ce soit ; et de sa part, le sieur DUBRUEL renoncent à la jouissance des aubiers qui sont sur les bords du fossé des terres de fourney appartenante au dit sieur MEDOUX, laquelle jouissance avait été cédée au dit sieur DUBRUEL par le sieur LACHAUSSE, son vendeur, laquelle renonciation aura lieu par le présent et à l’avenir ; tous lesquels objets sont situés dans la paroisse de Bouliac.

Promettant, obligeant chaque partie à son égard renonçant.

Fait et passé à Bordeaux en l’étude de FAUGAS, notaire, le vingt et un février mille sept cent quatre vingt deux et ont signé

 
Antoinette, épouse de Pierre Antoine, décèdera en novembre 1783. De leurs sept enfants, tous natifs de Bordeaux, seule Marie-Pétronille survivra à Pierre-Antoine :

1 Antoine-Henri, ° 12 janvier 1754

2 Marie-Pétronile, ° 16 février 1755 épouse de Pierre GUERIN. Ils eurent cinq enfants : Basile, Auguste, Alexandre, Aimée et Colombe qui ont laissé bon nombre de descendants. Colombe épousa Jacques BARENNES, Commandeur dans l’ordre de la légion d’honneur, préfet de Gironde, membre du tribunal des conflits et Conseiller d’Etat dont le père, Conventionnel, ne fut ni régicide, ni guillotiné ( désolé…)

3 Marie-Henriette, ° 25 août 1756

4 Anne Toinette, °1757, + 26 avril 1761

4 Antoine-Jean-Arnaud, ° 24 juillet 1758, +28 avril 1761

5 Jean-Baptiste-Basile-Victorin, ° septembre 1759, +24/ avril 1761

6 Joseph-Hilaire, ° 2 décembre 1760

7 Félix-Antoine, ° 14 janvier 1762 , + 14 juillet 1765.


1785 est une grande année pour Pierre Antoine qui, encore cité, par l’almanach de Bordeaux comme chirurgien major de la marine, se voit confier désormais en juillet et en août de chaque année, un deuxième cours à l’Ecole de Chirurgie sur la pathologie chirurgicale. La même année, il est élu par ses pairs directeur de la Société Académique de chirurgie de Bordeaux, responsabilité qu’il exercera jusqu’en 1788.

Par acte du 18 septembre de cette même année, passé devant BARON, notaire à Bordeaux, Pierre-Antoine manifeste sa reconnaissance à sa sœur Marie pour sa contribution, pendant de nombreuses années, à l’entretien de la famille et à l’éducation des enfants. Au passage, il règle la maigre succession parentale.


« - Pierre Antoine Dubruel de Broglio, professeur royal aux écoles de chirurgie de Bordeaux, y demeurant place et paroisse Saint Projet

lequel reconnaît devoir à

- demoiselle Marie Dubruel de Broglio, sa sœur, fille majeure, demeurant avec lui

1°. La somme de 500 livres, faisant la moitié du produit de la vente des successions mobilières et immobilières de leurs père et mère communs, comme ayant employé dans le temps la totalité dudit produit à ses affaires particulières.

2°. La somme de 153 livres à laquelle s’élèvent les intérêts de la dite somme de 500 livres, déduction faite des impositions royales, suivant la liquidation qui en a été faite entre les parties.

3°. La somme de 4 500 livres « à cause et pour raison des services qu’elle lui a rendus et à sa famille depuis trente ans en employant son temps et tous ses soins aux besoins de son ménage, et à concourir à l’éducation de ses enfants, sans en avoir retiré d’autre fruit que les aliments et un entretien très modeste »

le tout s’élevant ensemble à la somme de 5 153 livres.

« L’obligation de laquelle somme ladte demlle Dubruel n’accepte qu’à cause de l’incertitude des événements de la vie, n’ayant jamais eu d’autre désir que de passer ses jours chez luy, ny de plus grande peine que de ne pouvoir luy laisser, et à sa famille, que des témoignages de son tendre attachement ; c’est pourquoi comme elle serait au désespoir que cette somme passat dans des mains étrangères, et qu’elle n’entend en profiter que pour sa subsistance dans le cas que quelque fatalité la sépare dudit sr son frère, elle le prie de vouloir bien l’accepter à titre de fonds perdu, moyennant une rente viagère de cinq cents livres. »

À quoi le dit sieur Dubruel déférant, il a constitué une rente viagère de la dite somme, payable demi année par demi année, « à commencer du jour que la dite demoiselle se séparera de lui, ou du jour du décès dudit sr Dubruel pour durer sans interruption pendant la vie de la dite demlle du jour du décès de laquelle la dite rente sera entièrement éteinte et amortie », étant convenu que pendant qu’ils demeureront ensemble, la dite rente sera compensée par la nourriture, logement et autres besoins qui lui seront assurés."


 Le 11 décembre 1787, il préside la Commission chargée de suivre la construction des bâtiments de la nouvelle salle d’assemblée de la Communauté des chirurgiens et de veiller à la bonne utilisation des 16.000 livres empruntées à cet usage au taux de 10%.

En 1788, Pierre-Antoine vend le bourdieu de Fourney, dont la maison de maître est dite toute neuve, au sieur Antoine MAURY, aimanteur juré et celui du Saubat au sieur LABAT, concierge du Palais de l’Ombrière.

La Révolution n’interrompra pas sa carrière ; le 3 janvier 1792, il est nommé professeur au collège Saint Côme et sera confirmé dans son poste lorsque celui-ci deviendra l’Ecole publique de Chirurgie.

Dans les inventaires des archives municipales de la ville relatifs à cette période, Pierre Antoine est également cité comme médecin examinateur du bataillon de Bordeaux.

1793, il fait partie des « officiels » du régime : « je, Pierre-Antoine DUBRUEL, officier de Santé, Professeur au Collège National de l’art de guérir, certifie avoir été appelé dans les premiers jours d’août dernier, pour donner mes soins au citoyen LAUJACQ, juge alors au Tribunal de district de cette ville ; que l’ayant visité et examiné, je le trouvai dans un accès de fièvre violent, la peau avec une grande chaleur, la peau et la langue encore sèches et arides, avec une soif inextinguible ; que cette fièvre a été continue avec des redoublements presque pendant tout le mois d’août ; qu’à la suite de cettte fièvre, il a été attaqué d’une ictère ou épanchement de bile, qui le rendit jaune et d’une couleur safranée ; que je lui ai administré les remèdes convenables, prescrit le régime et surtout l’exercice du cheval lorsqu’il a été en état d’y monter et c’est ce qu’il a fait pendant plusieurs jours de ce mois. C’est ce que j’atteste dire vrai, ce 30 septembre 1793, l’an deuxième de la République Françoise une et indivisible »

En 1795, il poursuit sa pratique, mais cesse son enseignement au Collège St Côme

En 1797, lorsqu’il épouse Rose SARAVIE-SAINT MARC, il déclare, laconiquement, jouir d’un revenu annuel de 2.000 livres et constitue pour son épouse une rente viagère de 650 francs.

Contrairement à son fiancé, la future épouse détaille ses biens, évalués à 1.800 francs, dans le contrat de mariage passé le 2 Ventôse an V devant Maîtres TROUPENAT et BARON :

« un lit d’environ quatre pieds, composé d’une coëtte, deux matelas, un traversin, un carré, une couverture de laine, une autre de coton, une courtepointe, ciel, dossier et pentes en indienne fendue blanc, les rideaux de coton blanc.

Plus un autre lit en baldaquin, deux matelas, deux traversins, une couverture de laine, courtepointe et rideaux de cotonille.

Plus un autre petit lit ancien, un matelas, un traversin, des rideaux d’écarlatte et courtepointe de vieux satin.

Plus une bergère en paille, une table à jeux, deux fauteuils, huit chaises et un sopha le tout en raguette, trois paires de rideaux de fenêtres, six chaises fines, douze autres communes, une serinette, un paravent.

Plus sept paires de draps de lit tant fins que communs, cinq douzaines de serviettes, six nappes, quatre douzaines d’essuie-mains ou tabliers de cuisine.

Plus quatre douzaines d’assiettes, cinq plats, trois soupières, le tout de fayance, six solitaires, huit tasses et leur sucrier avec une théière et son plateau, le tout en grès ; une autre théière et son sucrier de porcelaine de Limoges, deux caffetières en fer blanc.

Plus trois paires de chevets dont deux garnies en cuivre, trois pincettes, deux pelles et une barre à feu, un réchaud de 2,3 pieds, deux grilles, deux broches, deux paires de fers à repasser le linge, un moulin et une poëlle à caffé, une poëlle à frire, deux seaux dont un à bec, deux paires de flambeaux de composition, deux paires de mouchettes, deux couverts d’argent, quatre petites cuillères à caffé aussy d’argent, six couverts d’étain, une veilleuse, cinquante bouteilles, une tourtière en cuivre, un hôpital en cuivre, une armoire bois de noyer à une porte, une autre à deux portes peintes en rouge, deux tables dont une à quatre tiroirs, deux bols, deux écuelles de faïence, trois coussinières et une scie. »

 …et un raton laveur ! 

 

De cette union, naquirent les trois enfants cités dans le testament de leur père et dans celui de Jean-Guillaume DUBRUEL, de Tournon.


1 Pierre-Antoine,

2 Pauline, et

3 Marc-Auguste, ° 12 Ventose an X, + 22-01-1878 Bordeaux

 
Testament de Pierre Antoine en date du 30 frimaire an XI.

«  Par-devant le notaire public de Bordeaux soussigné et en présence des témoins ci-après nommés a comparu le citoyen Pierre Antoine DUBRUEL, officier de santé, demeurant à Bordeaux, rue Porte Dijeaux n°3 ;

Lequel étant malade, néanmoins en tous ses bons sens, mémoire et jugement a fait, dicté et prononcé mot à mot intelligiblement les dispositions ci-après sous la forme de codicille en présence des dits témoins au dit notaire qui les a écrites à fur et à mesure qu’il les a dictées comme il suit.

Je donne et lègue à Pierre Antoine, Pauline et Marc Auguste DUBRUEL, mes trois enfants nés de mon second mariage avec Marie Rose SARAVIE SAINT-MARC, par préciput et avantage à Marie DUBRUEL épouse du citoyen GUERIN, seul enfant né de mon premier mariage avec Antoinette HUGON, la cinquième partie de tous les biens meubles et immeubles que je délaisserai et généralement de toute mon hérédité ; en quoi j’institue mes dits trois enfants de mon second mariage mes héritiers particuliers.

Voulant témoigner à mon épouse tout mon attachement et lui procurer les moyens de vivre dans une honnête aisance, je lui donne et lègue une rente et pension annuelle et viagère de la somme de 550 francs indépendamment de celle de 650 francs dont je lui ai fait donation par notre contrat de mariage passé le 2 ventôse an cinq devant BARON et son collègue, notaires à Bordeaux ; laquelle pension totale de la somme de 1.200 francs sera payable six mois par six mois et d’avance à compter du jour de décès, sans aucune retenue soit pour cause de contribution créée ou à créer, soit pour aucune autre cause ; en quoi j’institue ma dite épouse mon héritière particulière. Dans le cas où le présent legs viendrait à être querellé par mes héritiers, je donne et lègue à ma dite épouse pendant sa vie à compter du jour de mon décès la jouissance de l’entière portion de mon hérédité dont la loi me permet de disposer à ce titre en sa faveur, l’instituant aussi, moyennant ce, mon héritière particulière.

Je veux que le présent codicille soit exécuté nonobstant toutes dispositions contraires que je pourrais avoir faites, lesquelles je révoque et annule expressément.

Lecture faite des présentes en entier par le dit notaire au dit citoyen DUBRUEL, en présence des témoins, il a déclaré, aussi en leur présence qu’il contient sa volonté dans laquelle il persiste.

Fait à Bordeaux, dans la demeure du dit citoyen DUBRUEL en présence des citoyens ci-après nommés et domiciliés à Bordeaux, à savoir : Antoine CHAZELLES, boulanger, rue Porte Dijeaux n°4, Antoine GRASSET, architecte, rue du Mirail n°45, Léon MAGONTY, pharmacien, rue Margeaux n°11 et Arnaud BERNARD, militaire réformé, rue Vergniaud, témoins à ce requis ont signé avec nous. Le citoyen DUBRUEL interpellé de signer a déclaré ne pouvoir à cause de la paralysie dont son bras droit est affecté. »

EPILOGUE

A cet endroit de cette historiette et puisqu’il est question d’héritage, je ne résiste pas au plaisir de vous transmettre un traitement de cheval qui valut à Pierre-Antoine les honneurs de la presse médicale Bordelaise, en l'occurrence le journal de médecine, chirurgie et pharmacie de Bordeaux de 1778 qui, évoquant un patient atteint d’une paralysie de la jambe, relate que : « le docteur DOAZAN et le chirurgien DUBRUEL, qui jouissent tous deux d’une réputation méritée confirment la tisane des bois et prescrivent deux vésicatoires aux cuisses, avec usage journalier d’un électuaire tonique et enfin une purgation médiocre tous les quatre jours ».... et précise que suite à ce traitement de choc, le malade se remit à bouger.


Les plus curieux d'entre vous iront sur Google Livres consulter les Mémoires et observations de médecine clinique de d'anatomie pathologique ... par Elie Gintrac dans lesquelles sont reprises deux observations de monstres humains devant le Collège de Chirurgie de Bordeaux. La seconde, réalisée par Pierre-Antoine, portait sur un monstre humain doté de 2 larynx, 4 poumons, etc ...


Pierre-Antoine nous a également livré un vrai secret de famille trouvé dans les papiers que m’avaient remis Guillaume DUBRUEL… pour votre information et réussir la mixture, je vous informe qu’un gros est l’équivalent de 3,816 grammes et que l’once, seizième partie de la livre, représente 30,594 grammes.

ELIXIR DE LONGUE VIE

COMPOSITION

Prenez une once et un gros d’aloi succotria, un gros de zéodaire, un gros de gentiane, un gros du meilleur safran oriental, un gros de rhubarbe fine, un gros d’agaric blanc, un gros de thériarque de Venise et une once de manne. Mettez en poudre et passez au tamis les six premières drogues et après quoi ayez une bouteille de gros verre qui puisse les contenir avec la manne, la thériarque et une pinte de bonne eau de vie ; bouchez bien la bouteille d’un parchemin mouillé ; quand il sera sec, piquez-le de plusieurs trous d’épingle afin que la fermentation ne la casse pas. Tenez le à l’ombre pendant neuf jours, ayant bien soin de la remuer matin et soir pour mêler la drogue. Le dixième jour, sans troubler la liqueur, couler doucement l’infusion dans une bouteille tant qu’elle sortira claire et boucher bien avec du linge cette colature ; puis mettez sur le marc une pointe d’eau de vie et observez ce qui est prescrit pour

la première infusion. La seconde colature faite et si la liqueur n’est pas bien claire, il faut la filtrer par un entonnoir avec du coton, prenant soin qu’elle ne s’évapore ; cela fait mêler les deux infusions et remettez la liqueur dans une ou plusieurs bouteilles que vous ne laisserez jamais éventer. On pourra s’en servir dès le premier jour de la mixion.

Avec l’usage de ce remède on vit longtemps sain et sans avoir besoin de saignées ou d’autres médicaments. Il restaure les forces, anime les esprits vitaux, aiguise les sens, fait cesser les tremblements nerveux, émousse les douleurs de la goutte et du rhumatisme, nettoie l’estomac de toutes les humeurs grasses et gluantes qui causent les indigestions, les aigreurs, les migraines et les vapeurs, tue les vers, guérit les coliques au bout de quelques minutes, rend gai, soulage les hydropiques, guérit les indigestions dans une heure de temps, purifie le sang, le fait circuler…. ( illisible )…et l’embonpoint ; purge imperceptiblement et sans douleur ; fait pousser la petite vérole sans risque et guérit toutes les fièvres intermittentes à la troisième dose. En un mot c’est le vrai préservatif et le restaurateur de l’humanité.


DOSE SUIVANTE : LES ACCIDENTS

Pour les maux de cœur : une cuillerée à bouche toute pure

Pour les indigestions : deux cuillerées dans quatre de thé

Pour la colique : deux cuillerées dans quatre d’eau de vie

Pour les accès de goutte : trois cuillerées toute pure

Pour la fièvre intermittente : une cuillerée toute pure avant les frissons et s’il ne guérit pas au premier et au second accès, il guérira immanquablement au troisième

Pour les vers : pendant huit jours à jeun, une cuillerée à café

Pour l’hydropisie : pendant un mois le matin, une cuillerée à café dans un verre de vin blanc

Pour purger en forme : trois cuillerées pour les personnes robustes et deux pour les femmes tout pur quatre heures après un léger souper ; on dort tranquillement la nuit et il n’opère que le lendemain sans douleur. Il ne faut prendre d’autre précaution que de ne rien manger de cru, ni salé, ni laitage et ne pas trop se tenir à l’air.


USAGE JOURNALIER QU’ON EN PEUT FAIRE

Il est de sept gouttes pour les femmes et de neuf pour les hommes, mais il faut le prendre dans le double de vin ; un vieillard en prend en outre une cuillerée tout pur tous les huit jours.

Pour la petite vérole, c’est un cordial ; on en donne d’abord au malade une cuillerée tout pur ; et pendant neuf jours une cuillerée de même, mais dans trois cuillerées de bouillon de mouton le matin à jeun.


OBSERVATIONS

Les personnes hautes en couleur, d’un tempérament chaud et bilieux, sujettes à la gravelle ou aux hémorroïdes ne doivent en pendre qu’en petite dose, comme une demie cuillerée à café une fois le matin de temps en temps, au lieu que la personne d'un tempérament froid, humide, phlegmatique et mélancolique peut en prendre tous les jours, le matin en se levant une cuillerée à bouche dans l’hiver et seulement la moitié dans l’été, pour corriger le vice de l’estomac et de la transpiration d’où naissent presque toutes les maladies. »


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